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30/08/2022
Les 16, 17 et 18 septembre prochains, sur le circuit du Castellet (83), le Bol d’Or fêtera son 100ème anniversaire. Un âge canonique n’ayant d’autre prise sur cette épreuve que celle de lui offrir une dimension historique. Pour le reste, c’est scintillant et enroulé dans une tunique de modernité que celui que l’on appelle le « Bol » continue de tracer son chemin.
Son chemin… C’est effectivement sur une piste en terre battue, et non sur une route, que le premier départ de cette drôle de compétition imaginée par Eugène Mauve est donné en 1922. Enfin drôle… disons plutôt avant-gardiste, puisque connue comme étant la première course motocycliste de 24 heures. Mais plus que « drôle », le Bol d’Or est davantage une course redoutée puisqu’on s’y engage seul. Une moto, un pilote, et un circuit à parcourir autant de fois que possible 24 heures durant. Le premier à franchir la ligne d’arrivée, une fois le second tour d’horloge achevé, est déclaré vainqueur. Simple. Un défi entre l’homme, sa machine, et le temps. Si les motos d’alors n’ont évidemment pas les performances, ni la fiabilité de leurs homologues modernes, c’est pourtant à une moyenne plus qu’honorable de 50 km/h que Tony Zind sur Motosacoche remporte cette première édition organisée par l’AAMM (Association des Anciens Motocyclistes Militaires) sur le circuit de Vaujours (95). Et c’est ce même Tony Zind qui doublera la mise l’année suivante, mais sur le circuit de Saint Germain en Laye (78) cette fois, toujours en région parisienne.
En 100 ans, le Bol d’Or aura migré sur 7 circuits différents. Pas beaucoup de déménagements finalement pour une épreuve qui aura été mise sur pause à plusieurs reprises, parfois contrainte et forcée (entre 1940 et 1946 pour cause de 2nd guerre mondiale), mais aussi quand elle fut abandonnée (entre 1961 et 1968), ou lors de la récente pandémie de covid19 qui contraignit les organisateurs à sauter une année (2020). Si elle célèbre son centenaire cette année, nous en sommes en réalité à la 85ème édition. Une constante dans l’histoire du sport dont les manifestations restent tributaires des circonstances extérieures. Il n’en demeure pas moins que le Bol d’Or s’inscrit parmi les rares événements sportifs à approcher, atteindre, ou dépasser ce cap des 100 ans. Les Jeux Olympiques modernes (1896), le Tour de France cycliste (1903), la Coupe du Monde de Football (1930), voilà, en ce qui concerne l’enracinement, quelques éléments de comparaison éclairant. Le Bol d’Or fait ainsi parti de la Cour des très grands, l’occasion pour les participants, et ce depuis sa création, de venir s’y confronter, d’abord seuls, puis à deux, puis enfin dans sa forme la plus récente à trois pilotes.
Durant les trente premières années, de 1922 à 1953, un seul pilote devait affronter seul ce double tour d’horloge. Un défi physique même si le rythme n’était évidemment pas celui tenu par les motos actuelles. Un défi mécanique aussi où les marques de motos suisses, belges, françaises, anglaises, italiennes s’illustrent, faisant là la promotion de leur solidité et de leurs performances. Des constructeurs d’alors dont la plupart ont rejoint les podiums des musées, Motosacoche, Gillet-Herstal, Monet-Goyon, Velocette… Et d’autres qui existent toujours, Harley Davidson, Moto Guzzi, Norton, même si leurs catalogues ne proposent plus de modèles destinés à de telles compétitions. Parmi ces marques européennes, finalement seule BMW (vainqueur de l’épreuve en 1948 avec le français Jacques Lenglet) continue son engagement dans les courses d’endurance, et avec son actuelle S 1000 RR, cherche à renouer avec son passé en s’imposant une nouvelle fois au Bol d’Or. Peut-être pour septembre 2022 ?
En attendant que l’Europe reprenne des couleurs (Aprilia, BMW et Ducati s’engagent désormais régulièrement) ce sont les firmes japonaises qui trustent les victoires sur l’épreuve, et ce, dès leur arrivée avec celle qui marqua le tournant dans l’histoire de la moto moderne, la Honda CB 750 Four. Vainqueur pour sa première participation en 1969, elle dût laisser une dernière fois la vedette les deux années suivantes à Triumph, avant d’imposer - avec toute l’industrie japonaise - une situation hégémonique. Depuis 1972, aucune édition n’a ainsi échappé à une marque du pays du Soleil Levant.
En 1981, année de sa naissance, l'association Club 14 était déjà présente sur le Bol d'Or. Le début d'une longue histoire...
L’industrie l’a bien compris, et chaque année depuis 100 ans, elle y engage son meilleur matériel pour affronter cette épreuve qui se pose, parmi toutes les compétitions motos, en véritable juge de paix. Un Graal convoité par les pilotes, où certains y auront même écrit les plus belles lignes de leur palmarès, dont le dernier est également notre contemporain, puisqu’à la retraite (sportive) depuis à peine deux ans. Vincent Philippe est bien le recordman de victoires au Bol d’Or, 9 premières places toutes acquises sur Suzuki. Derrière, on retrouve Gustave Lefèvre et Dominique Sarron (7 victoires), Alex Vieira et Matthieu Lagrive (6 victoires) …
Épingler un Bol d’Or à sa boutonnière, c’est y accrocher un morceau de légende. Parmi tous ces vainqueurs, Gustave Lefèvre jouit d’une place à part, certainement parce qu’il a été le premier à s’y imposer à la fois en solo et en duo. Le duo devenant la norme réglementaire à partir de 1954, et c’est depuis 1982 que le Bol se court avec trois pilotes. Trois pilotes qui aujourd’hui doivent, plus que jamais, cumuler les qualités d’endurance et de vitesse. Terminé le temps où avoir une condition physique optimale suffisait aux pilotes de pointe, désormais, le physique est un préalable indispensable, et c’est alors la vitesse pure du pilote que les équipes recherchent.
Les courses d’endurance aujourd’hui offrent un spectacle impressionnant, porté par des sprints successifs qui donnent à la course un rythme endiablé. Une course de vitesse de 24 heures, voilà bien plus comment qualifier l’endurance aujourd’hui. L’évolution du monde moderne vise le plus souvent à accélérer le temps, logique que dans un sport de performance il en soit de même. Pour ses 100 ans, le Bol d’Or avance avec des articulations de jeune premier, conscient du monde qui l’entoure, se fondant dedans sans effort, sans rien perdre de ses fondamentaux, ni de ce qui fait la raison de son existence : le dépassement. Un dépassement avec un grand « D », valant pour les hommes, qu’ils soient sur la moto, dans les stands, dans les bureaux d’études, dans les usines ou dans les ateliers… Dans le Bol d’Or finalement, c’est peut-être déjà ce « d' » qui brille le plus.
Le saviez-vous ?
Par Thierry Traccan