Motards pour l’Enfance : la solidarité au service des plus vulnérables
Publié le 10/10/2025
Depuis plus de dix ans, l’association Motards pour l’Enfance sillonne les routes de France à destination de l’espoir. À l’origine de cette initiative, Michel Lethiot, un motard passionné et engagé. Dans cet entretien, le président fondateur revient sur un parcours marqué par le dévouement et l’engagement associatif.

Bonjour Michel, pouvez-vous nous présenter votre parcours et la genèse de l’association ?
Je m’appelle Michel Lethiot, j’ai 59 ans et je suis le fondateur de l’association Motards pour l’Enfance France, créée il y a dix ans. L’histoire remonte à mon moto-club, les Wild Hog’s Rider, fondé il y a dix-neuf ans. Un jour, l’un de nos membres a rencontré dans un train un motard de Meuse Champagne-Ardenne appartenant à une association nommée Motards pour l’Enfance, leurs membres venaient en aide aux enfants. À l’époque, nous venions de perdre un de nos enfants, il est devenu évident avec mon épouse de nous engager dans cette cause.
Nous avons donc créé cette association à l’échelle nationale et aujourd’hui la Meuse Champagne-Ardenne est une de nos antennes. Nous venons en aide aux enfants victimes de maltraitances physiques, psychologiques ou sexuelles, ainsi qu’aux enfants atteints de maladies rares. Les familles nous sollicitent directement et nous leur apportons un soutien matériel, mais surtout humain.
Votre parcours professionnel a-t-il influencé cet engagement ?
Oui, incontestablement. J’ai travaillé comme moniteur-éducateur sportif auprès d’enfants handicapés, puis comme surveillant de nuit au sein de l’association APUI1 et Les Papillons Blancs2 dans le Pas-de-Calais. Mon épouse est aide médico-psychologique.
Nous avons toujours évolué dans le secteur médico-social, ce qui nous a sensibilisés très tôt aux besoins spécifiques de ces enfants. Il y a eu une convergence entre notre histoire personnelle, notre parcours professionnel et la rencontre avec cette antenne locale. Très vite, nous avons réuni les membres des Wild Hog’s Rider pour fonder Motards pour l’Enfance France. L’élan était naturel.

Depuis quand la moto occupe-t-elle une place importante dans votre vie ?
Mon père et mon grand-père étaient motards, c’est une passion familiale que j’ai depuis mes 14 ans. Aujourd’hui, je possède quatre motos : une Kawasaki 1000 GTR en restauration, un 500 Silver Wing, un 650 Silver Wing et une 80 MTX pour mon enfant, à qui j’ai transmis la passion. J’ai roulé pendant onze ans en Harley-Davidson, avant de revenir à des mécaniques plus anciennes et accessibles.
Comment l’association est-elle structurée aujourd’hui ?
Je suis président et fondateur de Motards pour l’Enfance France. Quant à mon épouse, elle dirige les antennes des Hauts-de-France et de la Loire-Atlantique. Nous avons aussi une antenne active en PACA, et deux autres en sommeil (en Occitanie et en Meuse Champagne-Ardenne). Dans les Hauts-de-France, nous comptons environ cinquante bénévoles actifs.
Quel est l’événement solidaire principal que vous organisez chaque année et comment accompagnez-vous les enfants au sein de l’association ?
Il faut tout d’abord dire que chaque année nous nous concentrons sur un seul enfant pour maximiser l’impact de nos actions. Pour collecter des fonds en faveur de cet enfant, nous organisons notamment des balades solidaires lors de la Journée de l’Enfance qui est notre rendez-vous annuel majeur.
Ensuite tout au long de l’année, nous suivons son évolution, restons en lien avec la famille, offrons des moments de répit – une balade en side-car, par exemple – et des expériences uniques. Comme nous ne versons pas d’argent directement aux familles, cela nous permet de financer ses équipements et de participer à l’achat de matériels non remboursés.
Nous intervenons aussi dans les instituts médico-éducatifs et structures spécialisées, avec des motos adaptées aux différents handicaps.

Comment mobilisez-vous les motards ?
Mon expérience de plus de quarante ans sur la route m’a permis de développer un large réseau. Mais il faut reconnaître que l’esprit d’entraide motarde s’affaiblit un peu chez les jeunes générations. Heureusement, les réseaux sociaux nous permettent encore de rassembler autour d’une cause juste. Au-delà de cela, l’ambiance lors de nos événements est toujours chaleureuse et l’esprit motard reste vivant : on partage, on échange, même entre inconnus.
Nous profitons aussi des événements pour sensibiliser, présenter l’enfant parrainé, et expliquer nos autres moyens de financement, comme le recyclage. Les enfants adorent la présence des motards ! Pour la plupart, la moto est un symbole fort, synonyme de liberté, de force… Très peu d’enfants en ont peur, ils sont plutôt émerveillés.
Certains moments vous ont-ils particulièrement marqué ?
Oui. Nous avons accompagné plusieurs enfants jusqu’à leur dernier souffle, ce qui reste très difficile. Mais il y a aussi de belles histoires, comme celle de ce garçon atteint de leucémie à qui nous avons aménagé une chambre adaptée pour qu’il puisse jouer au foot malgré l’isolement imposé par son traitement. Il y avait des ballons de football, une cage adaptée, des instruments assez spécifiques. Aujourd’hui, il a 14 ans et est en rémission grâce à une seconde greffe de moelle osseuse. Ça, c’est notre plus belle victoire.
L’association permet-elle également de faire évoluer l’image du motard ?
Oui. Pendant longtemps, le motard était associé à l’image du blouson noir et de la marginalité. Aujourd’hui, nous voulons montrer que le motard est solidaire, engagé et humain. Tous les profils sont les bienvenus au sein de l’association, peu importe l’âge, la marque ou la cylindrée : ce qui compte, c’est l’envie de s’investir.
Il y a une grande fraternité, nous participons à de nombreux événements régionaux où nous tenons des stands, vendons des objets pour les motards et des jouets pour les enfants. Entre fin avril et octobre, nous avons très peu de week-ends libres. Ce rythme crée des liens forts entre passionnés de motos.

Quelles sont aujourd’hui vos plus grandes difficultés ?
Le financement, sans hésitation. Nos camions vieillissent et nécessitent d’être remplacés, ce qui est un vrai défi car ils sont essentiels à notre activité de recyclage — une source de recettes précieuse pour l’association. Malheureusement, ces recettes sont en forte baisse.
À cela s’ajoutent des loyers élevés et l’absence d’aides publiques, que nous avions autrefois. Aujourd’hui, nous devons faire face à de nombreuses charges sans soutien communal, régional ou départemental. Seuls les dons, parfois défiscalisables, nous permettent de continuer à agir.
Quels sont vos objectifs pour l’avenir ?
Nous souhaitons obtenir de nouvelles aides financières, qu’elles proviennent d’entreprises ou d’institutions. Couvrir nos charges permettrait de consacrer le maximum aux enfants. Toute aide, qu’elle soit financière, matérielle ou humaine, est précieuse. Les personnes intéressées peuvent nous contacter facilement via nos réseaux sociaux, faire un don ou proposer leurs services.
Pour soutenir l’association Motards pour l’Enfance : https://motards-pour-l-enfance.e-monsite.com
1 Association loi 1901, l’APUI lutte contre l’exclusion en permettant la réinsertion de ses bénéficiaires. Depuis 1978, elle accueille dans ses foyers des hommes, des femmes et des enfants en situation de précarité et accompagne vers l’autonomie les personnes hébergées.
2 Créée par des parents d’enfants en situation de handicap mental, Les Papillons Blancs est une association qui se mobilise auprès des personnes en situation de handicap mental/cognitif, soutient leurs familles et sensibilise de la société au handicap. Elle possède plusieurs antennes en France.
Visuels : © Motards pour l’Enfance