Rencontre avec Bruno Wojciechowski et les Sauveteurs en Mer de la SNSM

19/01/2024

Le travail des nageurs sauveteurs de la SNSM, facilement reconnaissables dans leur tenue orange sur les plages du littoral l’été, ne s’arrête pas après le départ des touristes. Déployés tout au long de l’année à l’occasion de rassemblements sportifs ou culturels, ils apportent les premiers secours aux participants, sur terre comme en mer. Bruno Wojciechowski, responsable du CFI Vendée (Centre de Formation et d’Intervention), nous en dit plus sur la mission de ces anges gardiens de la mer.

Bruno Wojciechowski

Pouvez-vous nous parler de votre parcours jusqu’à ce poste de responsable du CFI Vendée ?

J’ai grandi en Seine-et-Marne, mais j’ai toujours été attiré par l’eau et la mer. À mes 17 ans, j’ai décidé de passer la formation de nageur sauveteur à la SNSM et j’ai commencé la surveillance des plages en 1990. Pendant l’été 93, j’ai surveillé la plage de Talmont-Saint-Hilaire en Vendée, et depuis, je n’ai plus quitté ce territoire.

Depuis plus de 10 ans, je suis responsable du CFI SNSM de Vendée. Mon activité à la SNSM est purement bénévole, comme pour tout le personnel dans les centres de formation et les stations. En dehors, je suis directeur des services techniques d’une collectivité en Vendée, à Venansault. Il y a certaines semaines où je suis plus présent à la SNSM qu’au travail. Mais cela reste une envie très forte, c’est un choix.


Quelle est la mission de ce CFI Vendée ?

Nous réalisons plus d’une centaine de missions de sécurité civile par an. Notre objectif est de former des nageurs sauveteurs qui seront déployés sur les plages l’été et interviendront dans la bande des 300 mètres du rivage, à savoir la zone sous responsabilité des mairies qui les embauchent pour cela. Nous sommes une centaine de bénévoles, dont une soixantaine de nageurs sauveteurs. Le CFI Vendée est l’un des rares à disposer de ces agréments au niveau national.

Au-delà de la bande des 300 mètres, au niveau de la SNSM, les interventions sont du ressort des stations de sauvetage qui interviennent jusqu’à 20 milles (32 kilomètres). Il s’agit de deux organisations du sauvetage différentes, puisque placées sous des autorités à part, assurées par deux groupes de bénévoles de formations distinctes, mais nous avons l’habitude de collaborer.


En plus de la formation des nageurs sauveteurs, quelles sont les autres activités du CFI ?

Nous sommes régulièrement déployés pour assurer la sécurité civile d’évènements sportifs ou culturels à travers des Dispositifs Prévisionnels de Secours (DPS). Nous mettons en œuvre des moyens maritimes ou terrestres, sur demande des organisateurs d’évènements publics, pour assurer les premiers secours.

C’est le cas notamment lors de courses à la voile comme le Vendée Globe, le New-York Vendée Les Sables-d’Olonne (qualificative pour le Vendée Globe), la Golden Globe Race ou d’autres évènements comme le triathlon de La Baule, par exemple.

Les Sauveteurs en Mer pendant de la Route du Rhum

Comment se déroule l’organisation d’un évènement majeur comme le Vendée Globe, dont la 10ᵉ édition s’élancera fin 2024 ?

L’organisation générale du Vendée Globe est gérée par la SAEM Vendée 1. Pour planifier la sécurité terrestre et maritime de tels évènements, la préfecture de Vendée organise des réunions en amont avec les différents acteurs concernés, généralement 6 à 8 mois à l’avance.

Pour la partie terrestre, il y a entre autres les pompiers, la gendarmerie et la police. Le but est de définir ensemble les missions de chaque entité. C’est d’autant plus important que pour le départ du Vendée Globe, il y aura jusqu’à 400 000 personnes présentes aux Sables-d’Olonne. Il y a ensuite la partie SAR (Search And Rescue), le sauvetage en mer, assuré par la SNSM, les pompiers, la gendarmerie maritime et d’autres services de l’État.


Quels sont les moyens mis en place pour l’occasion ?

Au centre de formation, nous avons une convention passée avec l’organisateur de la course pour lui mettre à disposition, le jour du départ, des bénévoles SNSM sur des semi-rigides, pour être au plus près des concurrents et intervenir rapidement en cas de problème. On met en place, avec le renfort d’autres entités SNSM, 3 semi-rigides médicalisés de 5,50 mètres et 3 semi-rigides de 6 mètres, qui vont rester au plus proche de la côte.

L’organisateur dispose aussi de sa propre flotte de semi-rigides qui balisent et interdisent l’accès dans une zone d’exclusion, spécifiquement réservée aux bateaux de course. Ils ont une mission de police, tandis que les bateaux SNSM ont une mission de sauvetage, en cas d’incident.

En complément de ce dispositif sont aussi déployés des vedettes et zodiacs de la Gendarmerie nationale et, sous l’égide du CROSS, des moyens SNSM Station : vedettes de Talmont-Saint-Hilaire et de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, CTT (canots tous temps) des Sables-d’Olonne et de l’Île d’Yeu.

Les bénévoles de la SNSM au départ de la Route du Rhum

Comment s’organise la circulation des centaines de plaisanciers présents sur le port au départ du Vendée Globe ?

En amont de la course, un ordre de priorité est décidé par la préfecture maritime et la préfecture de la Vendée. Les premiers à sortir sont évidemment les bateaux de course. Suivent les bateaux de plaisance, puis les bateaux à passagers pouvant contenir plusieurs centaines de personnes.

Généralement, tout se passe bien grâce à une bonne délimitation des zones, mais cela peut rapidement se compliquer. Il y a régulièrement des pannes, des collisions ou des retournements de petites embarcations, mais nous n’avons pour l’instant jamais eu de naufrage.


Comment vous préparez-vous à toutes les éventualités sur ce genre de gros évènements ?

Quelques mois avant le Vendée Globe, nous effectuons un exercice de sauvetage appelé « Search And Rescue » (SAR) départemental. Nous partons d’un scénario catastrophe, comme un bateau à passagers qui prendrait feu. L’idée est de faire une répétition grandeur nature et de déployer les moyens nautiques et terrestres, pour que tout le monde travaille ensemble. L’exercice dure environ une journée.

Départ de la Route du Rhum

Quels genres d’interventions êtes-vous amenés à effectuer ?

Sur les départs de courses, ce sont bien souvent des malaises liés à des maux de mer. Sur les bateaux à passagers, les personnes ne sont pas forcément des marins aguerris et au mois de novembre, les conditions de mer ne sont pas idéales. Il faut donc parfois les rapatrier d’urgence à terre. Ce sont des malaises bénins, mais qui peuvent rapidement s’aggraver. Nous avons aussi eu des malaises cardiaques et des hypothermies après des chutes dans l’eau.

Sur des évènements comme les triathlons, il y a beaucoup de « bobologie » (des blessures ou des maux sans gravité), des crampes, de la fatigue, mais parfois aussi des arrêts cardiaques.


Quelle est la spécificité du Vendée Globe par rapport à d’autres courses ou rassemblements ?

Je dirais surtout l’engouement populaire. C’en est presque effrayant de voir autant de monde au même endroit, au même moment... Au niveau des bateaux aussi, le nombre est impressionnant. Lorsque que vous êtes en mer, c’est une véritable meute qui arrive sur vous.

Les bateaux à passagers arrivent à la fin à pleine vitesse pour tenter de rattraper les bateaux de course. C’est un peu la foire d’empoigne pour que chacun ait sa place. Si vous ajoutez à cela des conditions météorologiques difficiles, avec 2 ou 3 mètres de creux et les sillages des uns et des autres, je vous laisse imaginer la scène.

1 La SAEM Vendée est composée de collectivités territoriales comme le Conseil départemental, la ville des Sables-d’Olonne, la Région des Pays de la Loire et 32 entreprises locales.

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Visuels : © Luc Cividino/SNSM, DR