Grand Pavois 2024, retour à flot

Publié le 15/10/2024

Depuis 1973, les professionnels du monde de la plaisance se donnent rendez-vous à la fin du mois de septembre pour présenter les dernières nouveautés du secteur au Grand Pavois de La Rochelle. Un évènement incontournable qui rassemble chaque année plusieurs dizaines de milliers de passionnés sur le port des Minimes. À l’occasion de la 52ᵉ édition qui a eu lieu le 1er octobre dernier, Pierrick Garenne, Commissaire Général Adjoint, revient sur l’Histoire du salon et nous livre les nouveautés 2024.



Pierrick GarennePierrick Garenne, Commissaire Général Adjoint du Grand Pavois.

Présentation de Pierrick et de son parcours

Bonjour Pierrick. Vous êtes depuis une vingtaine d’années Commissaire Général Adjoint de Grand Pavois Organisation. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre parcours ?

Par le passé, j’ai travaillé comme journaliste et dans les services communication de grands évènements nautiques : Route du Rhum, Vendée Globe, Transat Jacques, Solitaire du Figaro, Tour de France à la Voile etc. Puis, je suis arrivé à ce poste de Commissaire Général Adjoint en 2005, en charge de la communication, du marketing et de la stratégie.


Quel est votre lien avec l’univers de la plaisance ?

J’ai toujours travaillé dans des activités en lien avec la mer : courses au large, sports de glisse ou sports d’aventure. Cela fait véritablement partie de mon ADN. En dehors de cet aspect professionnel, je pratique la voile et la pêche sportive en mer. C’est une discipline assez particulière, car nous remettons le poisson à l’eau après l’avoir pêché. L’idée, c’est de pouvoir le trouver, savoir comment il vit et connaître son biotope pour être un pêcheur efficace, mais surtout responsable. Je pratique aussi différents sports nautiques : du surf et de la plongée sous-marine, notamment.


L’histoire et la stratégie du Grand Pavois

Comment a démarré l’aventure du Grand Pavois ?

Le Grand Pavois a été créé en 1973 par des professionnels rochelais. L’idée était d’être un salon à flot, avec des bateaux présentés dans l’eau et de valoriser la production locale, dans la région de La Rochelle. Il faut savoir que dans les années 70, la plaisance n’en était qu’à ses débuts. Pour résumer, nous passions du yachting à voile où les amateurs naviguaient en blazer, costume et cravate, à du nautisme « plaisir ».

Un certain nombre de constructeurs s’étaient installés à La Rochelle dans le cadre de la construction du port de plaisance des Minimes, qui est aujourd’hui l’un des plus grands d’Europe avec plus de 5 000 places. L’Histoire du Grand Pavois et du port sont intimement liés, car plus ce dernier grandissait, plus l’évènement s’étendait. La première année a rassemblé 34 exposants et 64 bateaux, puis, l’évènement s’est rapidement développé. D’abord autour des bateaux à voile, car le marché de la plaisance était presque exclusivement orienté vers la voile, puis plus tard autour des bateaux à moteur.

Aujourd’hui, le Grand Pavois rassemble plus de 400 bateaux à terre et 300 à flot.


Comment s’organise le financement du Grand Pavois ?

Avec plus de 80 000 visiteurs, le Grand Pavois est un atout très intéressant pour une ville comme La Rochelle. Les collectivités territoriales locales sont derrière nous, car elles sont conscientes de l’apport du salon en termes économique et de visibilité.

Nous avons des partenariats avec la région Nouvelle-Aquitaine, le département de la Charente-Maritime et la communauté d’agglomération de la ville de La Rochelle. Nous avons aussi des partenaires privés et bien évidemment les exposants qui représentent la majeure partie des ressources financières de l’évènement.

En tant qu’association, nous ne sommes pas là pour gagner de l’argent, ni pour en perdre. Nous essayons d’être fidèles à nos statuts qui sont d’être un outil de valorisation de la filière nautique, comme à son origine en 1973.

visiteurs du Grand PavoisLes visiteurs déambulant parmi les allées, pour admirer les modèles à terre comme à flot.

Quelle est la stratégie du Grand Pavois pour continuer de répondre au mieux aux évolutions du marché des salons et de la plaisance ?

Il faut savoir que l’évènement a été créé par des professionnels Rochelais sous le statut d’association loi 1901 (association à but non lucratif, statut qu’il a toujours aujourd’hui, NDLR.). Comme toute association, nous avons un président, un vice-président, un trésorier, un secrétaire, des administrateurs etc. L’ensemble de ce conseil d’administration n’est composé que de professionnels du nautisme. C’est un détail qui a son importance, car nous sommes au coeur du marché. Cela nous permet d’anticiper, d’essayer de répondre au mieux aux demandes de chacun et de nous adapter en termes de nouvelles idées, de nouveaux espaces ou même de nouveaux tarifs. L’objectif est de proposer un produit performant, qui soit à l’écoute du secteur, de ses professionnels et de ses pratiquants.


L’impact de la crise sanitaire et l’avenir du digital

Durant la crise sanitaire de la COVID-19, le marché des salons s’est tourné vers des alternatives digitales. Quel avenir voyez-vous pour ce genre d’initiatives ?

Il est vrai que de nombreux salons s’étaient entièrement digitalisés et proposaient même des visites virtuelles de bateaux. Il se trouve que ça ne remplace pas un salon physique. On l’a vu dès que nous avons pu rouvrir le Grand Pavois en 2021. Les marques sont revenues, toujours aussi nombreuses. C’est important pour elles de montrer les bateaux physiquement, de les toucher et de monter à bord. Et puisque nous sommes un salon à flot, il est aussi possible de les essayer en mer accompagné d’un professionnel.

Les marques se sont vite rendu compte que le digital était un outil de communication et de valorisation de produit intéressant, mais pas nécessairement suffisant pour de la vente. Le contact avec le client et le pratiquant reste primordial et les salons restent des temps forts importants pour les marques pour entretenir et réactualiser leurs fichiers clients.


Engagement pour l’écoresponsabilité

Comment se positionne le Grand Pavois face à la demande grandissante d’écoresponsabilité des salons ?

Quand on fait ce type de métier, on se doit d’aimer la mer. Nous nous devons de faire attention à un certain nombre de choses : recyclage de la majeure partie de nos déchets, limitation des process d’impression, signature de charte avec nos restaurateurs pour privilégier les cycles courts et limiter le plastique etc.

Pour le recyclage des déchets, le Grand Pavois a été le premier salon à mettre en place un système de recyclage au montage et au démontage. Il y a plus de 15 ans, nous avons été l’un des premiers organisateurs à mettre en place les poubelles bleues et jaunes. Avec le temps, nous nous sommes rendu compte qu’au-delà du choix du bac, pas toujours évident pour beaucoup d’entre nous, l’efficacité du recyclage dépendait beaucoup du processus après l’évènement. Pour répondre à ce problème, nous avons décidé de retrier les déchets des poubelles jaunes. Nous avons en quelque sorte notre propre chaîne de recyclage intégrée à l’évènement. C’est un exemple.

Au niveau des marques aussi, on se rend compte que certaines d’entre elles développent des solutions écoresponsables. Dans ce cadre-là, nous avons développé un espace spécifique qui s’appelle « Éco-navigation et Innovations Durables ». L’idée est de proposer des solutions alternatives pour aller vers un nautisme plus propre et de plus en plus de marques développent des produits spécifiques pour y répondre.

C’est aussi dans cet espace, que nous organisons des tables rondes et des conférences afin de toujours plus sensibiliser et mettre en contact des personnes, des startups, des entreprises… C’est un sujet primordial, sur lequel nous travaillons beaucoup et de plus en plus.


Sensibilisation du grand public : sentez-vous une évolution dans les mentalités ?

Je trouve qu’il y a un vrai changement qui s’opère actuellement et cela est aussi dû à l’évolution des règlementations. On développe de plus en plus de parcs nationaux marins dans lesquels on ne peut plus jeter l’ancre comme on le faisait par le passé. À l’avenir, on ne pourra y accéder qu’avec des moteurs électriques. De fait, l’aspect règlementaire va obliger certains plaisanciers à changer leur comportement.

Quoi qu’il en soit, je trouve que les façons de naviguer évoluent. On constate par exemple un petit retour vers la voile, ça n’est pas par hasard. Le marché des bateaux à moteur reste leader (7 à 8 bateaux sur 10 vendus dans le monde ont un moteur) mais on voit revenir des plaisanciers vers des modes de navigation plus doux et respectueux de l’environnement. Autre point important, on sait que les messages sont toujours plus puissants quand ils sont portés par des enfants et on sent que la jeune génération est beaucoup plus sensible à ces questions. On essaye de les sensibiliser sur le salon parce qu’en touchant les plus jeunes, on finira à terme par toucher les parents. Il faut enfin souligner que nous sommes toutes et tous, dans « le même bateau ». Nous nous devons de nous préoccuper de la mer et de son état de santé. Sans elle, nous ne sommes rien !

3D Craft Norden 6953D Craft Norden 695.

Nouveautés 2024 et anecdotes

Quelles sont les nouveautés pour cette édition 2024 ?

L’évènement a comme slogan : « la référence de tous les passionnés », donc on essaye de répondre au mieux à leurs demandes. À l’instar des profils, les envies sont assez diverses selon les pratiquants : voile, pêche, sports nautiques en tous genres… On a des espaces thématiques pour toutes les disciplines et cette année, nous avons développé un espace spécifique sur la location et les croisières. Avoir un bateau coûte assez cher, donc on voit le développement de nouveaux modes de consommation. Les jeunes générations notamment, plutôt que d’avoir un bateau, vont préférer aller en louer un entre copains via une plateforme de location entre particuliers ou chez un loueur.

Autre secteur sur lequel nous avons beaucoup travaillé cette année : les sports de glisse. La glisse est un secteur important pour nous, car ce sont beaucoup de néo-pratiquants. Le premier contact avec le nautisme est primordial à développer et à entretenir. Nous avons la chance d’avoir une partie du salon sur la plage, avec un espace que nous avons repris en main cette année et qui s’appellera « Grand Pavois Beach ». Il y aura des marques de glisse évidemment, mais aussi un espace d’animations avec des tables rondes, des conférences, des projections de films, des rencontres avec des sportives et sportifs médaillés olympiques ou skippers du futur Vendée Globe. L’idée est aussi d’amener les gens vers la pratique, donc il y aura la possibilité de faire des essais et des baptêmes. Nous mettons à disposition le matériel, les combinaisons et les moniteurs pour encadrer.

Sur cette plage, nous avons aussi un espace appelé « Handi Cap’Access » où nous accueillons des personnes atteintes d’un handicap, qui peuvent aller découvrir des activités sur l’eau avec un personnel dédié.

Enfin, le « Grand Pavois Beach » est ouvert à d’autres sports de glisse urbaine, comme le skate ou le BMX, de manière à faire le lien entre les différentes pratiques.

un pratiquant de e-foil électriqueLe Grand Pavois réunit tous les sports de glisse. Ici, un pratiquant de e-foil électrique.

Le Pays basque sera invité d’honneur cette année… Pourquoi avoir choisi cette région ?

Le Pays basque cochait de nombreuses cases sur l’aspect tradition nautique, maritime, culturelle et bien sûr, gastronomique. Nous sommes tous des fervents amateurs d’un bon verre d’Irouléguy avec des tapas, de la charcuterie et du fromage (rires).

Pendant le salon, il y aura de nombreux stands de gastronomie basque, des bandas, des danses, une exposition sur l’Histoire de la pelote basque etc. Au niveau nautique, on aura un navire école du Pays basque espagnol et on espère avoir une réplique d’une vieille chaloupe baleinière, typique de la région.


Quel a été le point d’orgue de cette édition 2024 ?

Il y en a un qui me vient tout de suite en tête, c’est le spectacle « Voiles de Nuit », un spectacle pyrodigital qui a eu lieu le samedi 5 octobre au soir. Il s'est tenu à l’extérieur du salon, dans l’avant-port de La Rochelle. C’est un spectacle reconnu internationalement, qui lie digital, pyrotechnie, musique et mise en lumière des remparts et des tours de La Rochelle. Il n’a plus été organisé depuis 2015 et avait été annulé sur les deux dernières éditions. Le spectacle a duré environ 2h30 à partir de 18h30 et a attiré entre 30 000 et 50 000 spectateurs.


Quelle est votre plus grande fierté en tant que Commissaire Général Adjoint ?

Ce qui me plait le plus, c’est d’avoir réussi à maintenir cette proximité et cette convivialité avec les visiteurs et avec les professionnels. Nous avons la chance, grâce au statut associatif et à notre Conseil d’Administration, de pouvoir garder une certaine distance pour ne pas nous laisser embarquer par des notions de résultats uniquement. Nous nous devons évidemment de faire venir des visiteurs, mais nous essayons de garder cette proximité avec les passionnés, d’être toujours à l’écoute du monde de la mer et des professionnels du nautisme sans qui nous ne serions pas là. C’est la recette du Grand Pavois et nous devons la préserver.


Avant de se quitter, avez-vous une anecdote marquante à nous raconter ?

Au moment de la création du salon, dans les années 70, la France sort tout juste du Mai 68 et l’heure est plutôt au rejet de la société de consommation. En 1973, le chanteur Antoine est en plein succès avec ses chemises à fleurs et ses cheveux à la Jackson Five. Il est alors en tournée dans le sud-ouest et lit dans un entrefilet qu’un bateau revient d’un tour du monde au moment du Grand Pavois. C’est le bateau de deux jeunes étudiants Grenoblois, partis en 1969 pour échapper à ce monde naissant de notre société de consommation. Ils vont remonter l’Amazone, naviguer au Spitzberg, en Georgie du Sud avant d’annoncer leur retour à La Rochelle. Antoine demande à son manager d’arrêter sa tournée pour venir les rencontrer et toutes ses futures aventures en bateau à travers le monde vont naître de cette rencontre, au Grand Pavois. Et pour la petite anecdote, Antoine sera présent cette année pour dédicacer ses livres et nous remémorer cette belle histoire… qui aura tracé ensuite toute sa vie.

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Visuels : © Olivier Blanchet / Grand Pavois Organisation