Brun d’Elle, un voyage culinaire en van
Publié le 18/11/2024
Résolument tournée vers la nature, la bonne nutrition et la santé, Delphine Lebrun (ou Brun d’Elle) est une cheffe traiteur nomade, indépendante et engagée. Sillonnant les routes de France à bord de son van, elle apporte sa vision de la cuisine et régale les amateurs de recettes simples, gourmandes et végétariennes. Nous avons rencontré cette passionnée qui donne un sens à ses assiettes : une interview qui donne l’eau à la bouche et invite à l’exploration.
- Delphine Lebrun, Brun d’Elle & Cuisine nomade
- Le van, véritable maison mobile & outil de travail
- Astuces & conseils de Delphine Lebrun
- Portrait chinois de Delphine Lebrun
Delphine Lebrun, Brun d’Elle & Cuisine nomade
Quelle belle histoire se cache derrière Brun d’Elle ?
Après des études en marketing, je suis allée vivre au Canada en débutant ma carrière dans l’industrie agroalimentaire. Là-bas, j’étais en constante collaboration avec des chefs en Recherche & Développement, qui développaient des nouveaux produits : des plats cuisinés. Suite à cela, il y a 6 ans, alors en quête de plus de sens dans ma vie professionnelle, j’ai effectué une reconversion. La cuisine étant déjà présente dans ma vie à cette période-là, je me suis naturellement tournée vers ce domaine. J’ai fait des stages pendant toute une saison dans le sud-ouest et en 2019, j’ai collaboré avec une amie en devenant traiteur pour des entreprises, ma société Brun d’Elle est alors née.
Pendant la crise sanitaire, j’en ai profité pour me former, affiner la vision que j’avais de l’alimentation et de la cuisine. Aujourd’hui, je cuisine pour des stages de yoga ou de développement personnel.
Vous vous considérez comme cheffe nomade. C’est-à-dire ?
En effet, le terme « cheffe nomade » est venu au fur et à mesure de mon activité professionnelle. Je mesure la chance que j’ai d’être indépendante et j’aime travailler dans des endroits immersifs, en pleine nature. Je me déplace dans des lieux où l’on a besoin de moi ponctuellement, pour nourrir des personnes pendant des stages en tout genre. Je parcours un peu toute la France pour mon activité, notamment la côte Atlantique. L’idée derrière ce terme est de partir avec mon van pour cuisiner à bord (si le nombre de convives n’est pas trop élevé) ou au sein de cuisines que l’on me prête.
Par votre expérience, avez-vous rencontré des communautés nomades, passionnés de van & de camping-car ou de cuisine ?
Grâce aux réseaux sociaux, j’ai pu rencontrer pas mal de gens qui vivent aussi en van et qui partagent mon mode de vie. J’ai également un ami, cycliste effréné, qui se déplace uniquement à vélo et qui est par ailleurs cuistot. Quand mes missions sont trop loin, je ne prends pas mon van pour éviter de polluer et je fais appel à lui. Il est déjà allé jusque dans les montagnes avec son vélo et environ 50 kilos de matériel et de nourriture. Il est incroyable ! Il écrit d’ailleurs un livre autour de la cuisine itinérante et du partage.
Quelle est votre vision de la cuisine ?
Ces dernières années, j’ai pris conscience de l’importance de l’alimentation dans notre santé globale. Mon souhait est de réellement faire du bien à notre corps et à notre esprit, mais aussi à tous nos sens. Il ne faut pas oublier qu’on mange aussi pour se faire plaisir ! Il est important d’allier plaisir, convivialité et santé.
À travers ma cuisine, je promeus le végétal avec des recettes végétariennes et j’apporte des réponses à la question des apports nutritionnels. Bien manger c’est prendre soin de soi et de la planète, donc faire attention à l’approvisionnement. Je choisis toujours des ingrédients locaux et je privilégie les circuits courts.
Le van, véritable maison mobile & outil de travail
Pour mener à bien vos prestations en tant que cheffe nomade, vous avez récemment acquis un van. Quel est le modèle de votre véhicule, pourquoi l’avoir choisi et comment l’avez-vous aménagé ?
Je suis nomade depuis bien longtemps car j’ai dû déménager au moins 17 fois dans ma vie ces 15 dernières années. Il y a quelque temps, j’ai fait un road-trip dans mon ancienne voiture pendant deux mois et demi : j’ai vu que c’était possible mais le confort n’était pas exceptionnel. J’ai eu envie d’acheter un van car j’avais des demandes pour cuisiner un peu partout en France et j’avais réellement envie de partir en exploration. C’était pour moi un rêve d’être nomade à 100 %. Je voulais un modèle pratique pour cuisiner partout et confortable.
Mon van est un Fiat Scudo, acheté d’occasion et qui fait moins de 2 mètres de hauteur. Je l’ai aménagé moi-même, à partir d’objets, de matériaux de seconde-main, et de récupération à 90 %.
Est-il devenu votre résidence principale ?
Depuis janvier 2024, je me suis installée dans la région du sud-ouest, à Bayonne, pour être réellement ancrée quelque part car cela fait des années que je suis très nomade. Je vis à mi-temps dans mon véhicule pour partir à l’aventure.
Où effectuez-vous vos déplacements ?
Je me déplace majoritairement dans le sud-ouest de la France mais cela varie beaucoup en fonction de mes prestations. Pour des raisons écologiques je fais attention à ne pas prendre l’avion et de privilégier le bateau quand cela est possible.
Rencontrez-vous des problèmes particuliers pour stationner ?
Je n’ai jamais rencontré de soucis jusqu’à présent, à part dans certains endroits, très rustiques, où il est interdit de stationner : je pense par exemple à la Presqu’île de Crozon, dans le Finistère. Je choisis plutôt des stationnements en pleine nature, en utilisant des applications comme « Park4night ». J’ai pu trouver de très chouettes endroits !
Rencontrez-vous des difficultés en conjuguant cuisine, petits espaces de travail et stockage ?
Optimiser l’espace a été un vrai questionnement. N’étant pas bricoleuse, j’avais envie de faire quelquechose de simple à bord de mon véhicule. En dessous de mon lit, il y a un tout un espace vide où je peux stocker mes caisses avec mes ingrédients pour les prestations. J’ai aussi d’autres rangements visibles, des étagères, où je peux ranger mes bocaux. Je trouve qu’il est important d’avoir une visibilité sur ce qu’on a pour s’inspirer. À l’arrière, j’ai également une petite cuisine qui s’ouvre, avec d’autres rangements. Je voulais expérimenter le minimalisme dans un tout petit espace et ramener de la simplicité dans ma vie de tous les jours, tout en restant efficace.
Astuces & conseils de Delphine Lebrun
Quels sont vos meilleurs conseils à bord du véhicule pour cuisiner ?
La simplicité est pour moi primordiale, être dans le brut et le naturel. Ne pas vouloir se compliquer la vie et vouloir faire beaucoup de choses qui parfois peuvent être compliquées. Privilégier la fraîcheur, la saisonnalité des produits et se laisser inspirer par les producteurs ou par la nature. J’aime beaucoup faire de la cueillette sauvage car je trouve incroyable le fait de pouvoir se nourrir de cette façon. La nourriture crue apporte aussi beaucoup de vitalité et reste très facile à cuisiner.
Quels sont les équipements ou ustensiles indispensables à avoir ?
Avoir des bons couteaux fait toute la différence dans la facilité que l’on va avoir à cuisiner et encore plus dans des petits espaces. Je rajouterais aussi un ustensile que j’utilise énormément : la mandoline. Elle offre beaucoup de possibilités quand on ne peut pas trop cuire parce qu’on est limité en feu dans un camping-car ou un van. On va couper très finement des légumes, comme des courgettes pour en faire un carpaccio. Il n’y a pas besoin de cuisson et c’est beaucoup plus digeste. C’est un ustensile que j’adore parce qu’il permet aussi de faire de belles choses visuellement.
Comment réussir à allier cuisine nomade et sans déchets ?
En achetant local et en promouvant le terroir qui nous entoure, car dans les supermarchés on trouve beaucoup trop d’emballages, même pour les légumes. Privilégier les petits producteurs, les stands de marchés, ou même parfois les bords de route. On peut aussi acheter en vrac dans des magasins spécialisés et des magasins bio avec des sachets déjà utilisés ou en tissu. On peut aussi apporter ses propres contenants pour éviter d’avoir des déchets qui nous encombrent, surtout lorsqu’on a de petits espaces dans son van ou son camping-car.
À la fin de l’été ou l’hiver quand on est chez soi, on peut aussi faire des conserves en verre de certains produits.
Je fais beaucoup de lacto-fermentation, qui préserve vraiment tous les nutriments des aliments. Par exemple, pour des tomates cerise, je vais les mettre dans une saumure avec de l’eau et du sel. Ça va permettre de les conserver sur une année et d’avoir des tomates fraîches qui sont lacto-fermentées.
Quelle recette conseillez-vous, à réaliser à bord d’un van ou d’un camping-car ?
Il y a tellement de recettes possibles (rires) ! Ce que j’aime beaucoup faire, qui reste pratique dans un véhicule et simple à réaliser, c’est la polenta. En fin de cuisson, on peut rajouter un peu de parmesan et des petites herbes, comme de l’origan sauvage que l’on peut trouver facilement dans la nature. Si c’est la période de l’ail des ours, ça peut être aussi une super idée d’en cueillir quelques feuilles. Pour accompagner, je conseille quelques légumes crus, comme des tomates.
Je pense aussi aux galettes de sarrasin car on a besoin que de deux ingrédients : de l’eau et de la farine de sarrasin. Sur une poêle bien chaude, on verse le mélange à galette et on rajoute par-dessus un oeuf battu, de la crème et des herbes aromatiques. Il est aussi possible de rajouter du fromage, comme de la feta. On accompagne la galette par une petite salade et c’est très bon !
Un dessert simple lors d’un voyage pour les gourmands qui nous lisent ?
Même si c’est difficile en van ou en camping-car d’avoir un four, il y a 1001 façons de faire autrement. Je fais souvent des puddings de chia : on mélange des graines de chia que l’on va faire gonfler toute une nuit, par exemple, avec un lait végétal. Si on n’a pas forcément de frigo, on peut faire aussi du lait végétal maison avec de la purée d’amande et un peu d’eau dans un bocal. On rajoute les graines en mélangeant bien, on rajoute une petite touche de sucré si on veut et on laisse reposer quelques heures, le temps que ça gonfle.
J’aime beaucoup aussi faire du granola, à la poêle, en mélangeant des flocons d’avoine, des noisettes, des graines de tournesol avec un tout petit peu d’huile, du sirop d’érable ou du sirop d’agave. On a le côté croustillant et croquant, qu’on peut rajouter sur le pudding de chia.
Un bon plat et une belle vue à bord du van : la recette d’une journée réussie !
Portrait chinois
Un ustensile de cuisine en van/camping-car ?
Un bon couteau ! Un couteau cranté, un Opinel… Pour moi c’est vraiment un indispensable à avoir dans son van ou son camping-car.
Un spot idéal pour s’inspirer et cuisiner à bord de votre véhicule ?
J’ai un gros attachement à la mer, à l’océan. Même si ce n’est pas l’endroit le plus simple pour cuisiner, on peut quand même y retrouver des plantes, comme de la roquette sauvage et de la Criste marine, qui viennent apporter un côté très savoureux au repas. Sinon, je dirais les abords d’une forêt avec beaucoup de plantes sauvages et un côté mystique.
Une région française préférée pour ses produits ?
Peut-être que cela va vous paraître étonnant mais je dirais la région du Pays basque. Il y a une réelle diversité de produits bio, locaux, et de producteurs. Une vraie pépite ! À Bayonne, où j’habite, il y a une dizaine de jardins partagés et énormément d’initiatives menées en faveur de l’agriculture. Il y a un vrai terroir, avec de bons fromages, dont celui de brebis, et le piment d’Espelette, que j’adore mettre dans toutes mes recettes. On peut y retrouver aussi du sel et du soja produits sans OGM. Je pense aussi au chanvre, que j’utilise beaucoup dans mes recettes.
Votre recette coup de cœur d’automne ?
Personnellement, j’adore cette saison pour son côté réconfortant et gourmand. Cette période-là me rappelle aussi lorsque je vivais au Canada, alors je dirais des pancakes à la courge butternut, avec de la cannelle et du sirop d’érable.
Visuels : © Delphine Lebrun