Road trip moto au Moyen-Orient : Jour 9, Sur la route de l’Orient-Express
Publié le 09/05/2022• Par David Dumain
Du Krak des Chevaliers à la frontière libanaise, il ne faut qu’une heure, mais Sylvain Tesson et ses compagnons d’aventure sont très tôt informés que le passage risque d’être long et fastidieux. Il y a d’autant moins de temps à perdre qu’une fois au Liban, les Yamaha doivent être « reconditionnées » avant d’être remises en caisse et que cette opération est une condition préalable à l’embarquement de chacun pour le retour. Si les checkpoints syriens n’ont posé aucun problème, la panne du véhicule d’assistance a considérablement retardé le convoi de Ténéré, mais tous ont pu quitter sans encombre la Syrie pour le Liban et se diriger vers Beyrouth pour la dernière étape du périple oriental sur les traces de Lawrence d’Arabie.
À l’époque où celui-ci sillonne le Levant pour le libérer d’un Empire ottoman dont la fondation remonte à 1516, le Traité de Sèvres qui partage l’ancienne Syrie ottomane entre le Royaume-Uni et la France n’a pas encore eu lieu (août 1920) et certaines frontières n’existent pas. La Syrie de Lawrence incluait alors l’actuelle Syrie, mais également le Liban, la Jordanie, Israël, la Cisjordanie et la Bande de Gaza, ainsi qu’une partie de l’Irak et même de l’actuelle Turquie. Pressés de gagner Beyrouth pour sécuriser leur retour, nos aventuriers se permettront tout de même une halte dans la gare abandonnée de Tripoli, deuxième ville du Liban qui n’a rien à voir avec la capitale de la Libye. Vestige de l’âge d’or de l’Orient Express, la gare proche d’El-Mina a constitué dans les années 20, 30 et 40 le terminus de la mythique ligne de chemin de fer reliant l’Europe à l’Orient et passant par Istanbul. Ce n’est pas cette ligne légendaire inaugurée à la fin du XIXᵉ siècle, pas plus que la ligne de chemin de fer reliant Beyrouth à Damas construite par une société française et prolongée par le fameux chemin de fer du Hauran que Lawrence attaqua dans ses célèbres actions de sabotage, mais le chemin de fer du Hedjaz reliant Damas à Médine. Les trains détruits par Lawrence peuvent d’ailleurs aujourd’hui se visiter dans cette ville d’Arabie Saoudite.
Dans l’ancienne gare de Tripoli construite en 1911, entre les herbes folles et la rouille qui la ronge, une mythique locomotive à vapeur « G8 » et des wagons voyageurs emblématiques sont à l’abandon depuis l’arrêt de l’activité en 1975. Nationalisée par les Français en 1920 et propriété de l’Etat libanais à l’indépendance de celui-ci en 1943, la gare abandonnée fait aujourd’hui l’objet d’une restauration afin d’accueillir des manifestations et évènements culturels. Comme un symbole, un protocole d’accord entre le ministère des Transports libanais et le Ministère turc du Tourisme a été signé en juin 2018 pour redonner vie à cet endroit mythique dans lequel Sylvain a pu se livrer à une séance de gymkhana entre les wagons au guidon de sa Ténéré. Dernières circonvolutions sur deux roues avant de rejoindre Beyrouth et rendre des motos tout juste égratignées par quelques chutes à l’arrêt, mais n’ayant présenté aucun souci technique tout au long des quelques 2 500 kilomètres du parcours, essentiellement effectués sur des routes goudronnées et non sur des pistes sablonneuses.
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