Gildas Gautier, directeur de la Transat Jacques Vabre

Publié le 27/10/2023

Les skippers de la Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre s’élanceront le dimanche 29 octobre du Havre, pour une édition qui devrait battre des records. À quelques jours du départ de la 30ᵉ édition de la célèbre course au large à la voile, le Directeur général de l’épreuve, Gildas Gautier, nous a accordé une interview exclusive.



Gildas Gauthier
Gildas Gautier.

Les nouveautés et le budget de la Transat Jacques Vabre 2023

Quelles sont les nouveautés attendues sur cette édition 2023 ?

Nous avons fait d’importants investissements afin de créer un nouveau modèle de départ innovant, une nouveauté parmi les grandes courses au large. Jusqu’à aujourd’hui, nous avions un départ commun pour toutes les classes de bateaux. Cela faisait de très belles images de voile, mais nous n’avions pas la narration sportive d’un départ de course. Pour remédier à cela, il y aura désormais 4 départs cadencés à 10 minutes d’intervalle, un par classe.

Cela permettra au spectateur de se concentrer sur chaque classe spécifique pendant ces courtes périodes, afin de mieux aborder ses points forts, ses défis et ses enjeux. Nous avons aussi disposé plusieurs bouées sur la première partie du parcours entre Le Havre et Étretat afin de recueillir un maximum de data, retransmises en temps réel : écarts, classements... Plutôt que d’avoir de belles images de voile, devant lesquelles commentateurs et spectateurs sont parfois un peu perdus, nous pourrons maintenant raconter une histoire et parler en détail des enjeux sportifs.

Quel est le budget de cette Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre ?

Le budget de l’édition 2023 va dépasser les 5,5 millions d’euros. Le chiffre est en augmentation depuis plusieurs éditions, notamment grâce à la croissance de l’événement en termes de notoriété et d’impact média. Nos investissements se concentrent notamment sur le renforcement des capacités d’amarrage du bassin Paul Vatine et du bassin de l’Eure (où seront notamment amarrés les Ultim, NDLR), qui accueillent la totalité de la flotte, et sur le départ diffusé en direct.


Gestion des abandons : le regard du Directeur Général

La dernière édition avait été plutôt clémente avec assez peu d’abandons, à l’inverse de celle de 2015. Comment abordez-vous cet aspect de la course en tant que Directeur général ?

Sur ce sujet, chaque année a sa propre vérité. Les conditions météorologiques sont évidemment déterminantes, c’est un véritable juge de paix sur chaque édition et c’est aussi ce qui fait la magie de la course au large. On ne maîtrise jamais tous les paramètres et il appartient aux marins et à la machine de placer le curseur au bon endroit, entre la performance et la sauvegarde du matériel.


L'écoresponsabilité : les actions au cœur de la Transat Jacques Vabre

La Transat Jacques Vabre a été pionnière en termes d’écoresponsabilité. Par quoi cela se traduit-il aujourd’hui ?

Nous avons entamé une transition vers davantage d’écoresponsabilité dès 2007. C’était à l’époque la première course à développer une charte de développement durable, à destination des exposants et des coureurs. Au début des années 2010, un travail de fond a été effectué avec l’ADEME (Agence de la transition écologique) pour concevoir un référentiel des événements éco-conçus, éco-gérés et éco-pensés. Cette démarche écoresponsable se traduit à tous les niveaux. Nous avons des employés qui se consacrent à 100 % à la partie RSE (responsabilité sociétale des entreprises) dans nos équipes opérationnelles. Ils ont une stratégie 360 degrés pour essayer, dès la conception, de diminuer notre impact environnemental. Nous effectuons bien évidemment un bilan carbone à la fin de chaque édition et nous essayons de l’améliorer d’année en année.

Quelles actions concrètes avez-vous engagées pour diminuer l’empreinte carbone de la course ?

Nous savons que la venue des visiteurs sur le village départ du Havre représente presque 80 % de notre empreinte carbone. En conséquence, nous développons, avec la SNCF et la région Normandie notamment, des solutions alternatives et plus écoresponsables leur permettant de se rendre sur le lieu de départ. Nous avons aussi créé un ticket vert, qui offre une expérience unique sur le village de la transat, sur présentation d’une preuve d’utilisation d’un moyen de transport de mobilité douce (vélo, trottinette...). Les visiteurs venant par un de ces moyens pourront participer à un tirage au sort qui leur permettra de remporter des lots.

Village Transat Jacques Vabre 2021Au port du Havre avant le départ de la Transat Jacques Vabre.

Comment se traduit cette approche écoresponsable au niveau des bateaux ?

Du côté des bateaux, nous avons ajouté une annexe environnementale au contrat signé par les participants. Cette annexe contient un tronc commun obligatoire qui leur impose de revenir à la voile plutôt qu’en cargo, d’avoir conservé 100 % de leurs déchets à bord à l’arrivée, ainsi qu’une quinzaine d’autres engagements. Chaque participant doit en cocher 7 lors de la première participation à la Transat, puis 10 lors de la suivante, etc.


Innovations des bateaux et des matériaux

L’innovation dans le secteur de la course au large progresse à une vitesse folle. À quelles nouveautés peut-on s’attendre, notamment au niveau des bateaux ?

Les innovations à venir ne sont évidemment pas des éléments sur lesquels communiquent les participants ou les propriétaires des bateaux engagés, mais les réflexions s’axent notamment sur la RSE et les nouveaux matériaux. Cela ne vise pas nécessairement la recherche de performance, mais ce sont des discussions tout aussi importantes.

Plusieurs entreprises explorent aujourd’hui de nouvelles pistes au niveau des systèmes ou des matériaux. Le skipper Roland Jourdain a, par exemple, préféré la fibre de lin au carbone pour la construction de son dernier catamaran, We Explore (avec lequel il s’est hissé à la 2ᵉ place lors de la dernière Route du Rhum en 2022, NDLR).


Les figures marquantes de la Transat Jacques Vabre

En trente ans d’existence, les noms de plusieurs grands navigateurs restent étroitement associés à l’histoire de la Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre. Quels sont ceux qui vous ont le plus marqué ?

Jean-Pierre Dick et Franck Cammas, recordmen de l’épreuve avec quatre victoires chacun, ont tous deux bien sûr marqué l’histoire de la course. Franck Cammas prendra d’ailleurs à nouveau le départ de la Transat Jacques Vabre cette année en tant que co-skipper de Jérémie Beyou sur Charal, en Imoca. Yann Eliès, qui compte déjà trois victoires au compteur, sera un sérieux challenger sur cette édition. On peut également citer les noms de Michel Desjoyeaux, Loïck Peyron, Yves Parlier, Laurent Bourgnon ou d’Alain Gautier.

L’histoire de la Transat Jacques Vabre est aussi étroitement associée à la mémoire de Paul Vatine, un grand navigateur havrais qui a gagné les deux premières éditions en 1993 et 1995 avant de disparaître tragiquement en mer à bord de son trimaran lors de l’édition 1999. Son équipier Jean Maurel, rescapé, est devenu quelques années plus tard directeur de la course.

Départ Transat Jacques Vabre 2019Départ Transat Jacques Vabre 2019.

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Visuels : © Jean-Marie Liot et Vincent Curutchet/Alea - Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre

Sources et infos : TRANSAT JACQUES VABRE