Roadcats Family : la vie nomade en bus aménagé

08/08/2023

Charlène, Valentin et leur fils Liam ont tout quitté pour se lancer dans la vie nomade, à bord d’un bus qu’ils ont eux-mêmes aménagé. Ils sillonnent le nord de l’Europe depuis déjà plus d’un an, en particulier les routes de Scandinavie, suivis par plusieurs milliers de followers sur les réseaux sociaux. Charlène nous explique comment la famille a presque tout vendu pour retaper un vieil autobus et en quoi consiste leur nouveau quotidien sur les routes.



Roadcats Family

Pouvez-vous nous présenter votre famille et vos parcours respectifs ?

Je m’appelle Charlène, j’ai 32 ans. Avec mon mari Valentin, 31 ans, nous avons un enfant de 6 ans et demi. Avant notre nouveau projet de vie, j'étais ingénieur en Qualité et Recherche et Développement dans l’agroalimentaire. Mon mari est chauffeur routier, et exerce toujours par intermittence, lorsque nous revenons en France. Il disposait donc déjà du permis de conduire poids lourds, indispensable pour conduire ce type de bus.


Quel a été le déclic pour vous lancer dans cette nouvelle aventure ?

Nous avons réalisé qu’une fois toutes les cases de la famille traditionnelle cochées – mariés, un enfant à charge, une maison et un travail –, plus nous avancions, moins nous étions heureux. Nous rêvions d’accéder à la propriété mais une fois que cela a été fait, nous sommes rapidement passés à autre chose. Lorsque je suis devenue maman, j’ai pris conscience de pas mal de choses, comme le fait que le cadre traditionnel de l’éducation ne nous correspondait pas et j’ai élargi cette réflexion à toutes les autres facettes de ma vie. J’ai fini par remettre en question ma vision du travail et de la propriété et par me dire que ce n’était peut-être pas le schéma qui nous convenait le mieux.

J’ai eu plusieurs fois des opportunités de CDI, mais l’idée de faire le même travail durant plusieurs années était une source d’angoisse assez importante. J’aimais ce que je faisais pendant 6 mois, puis une fois que je maîtrisais le sujet, je commençais à m’ennuyer. J’ai fini par comprendre que le CDI n’était pas fait pour moi.

De son côté, mon mari s’est lui aussi assez vite tourné vers l’intérim, ce qui lui permettait d’être plus libre. Son domaine professionnel offre constamment des opportunités d’emploi pour les travailleurs intérimaires, et comme il nous arrivait de partir pour de longs voyages, il pouvait arrêter son activé et facilement reprendre à notre retour.


Aujourd’hui, comment se déroulent vos activités professionnelles ?

Pour mon mari, l’avantage de l’intérim est qu’il ne travaille pas toujours au même endroit. Lorsque nous rentrons en France, nous restons assez libres de nos mouvements, car il trouvera du travail où que nous soyons. De mon côté, je suis créatrice de contenu autour de notre aventure, pour les réseaux sociaux.


Et concernant l’adaptation à cette nouvelle vie, pour votre fils ?

Elle s’est très bien passée, notamment parce qu’il était déjà habitué à beaucoup voyager. L’année d’avant, nous avions passé quatre mois au Mexique en van, par exemple. Il avait plutôt hâte d’emménager dans le bus !

Roadcats FamilyPendant l’aménagement du bus.

Pouvez-vous nous en dire plus sur la phase d’aménagement de votre bus ?

Initialement, nous ne voulions pas nécessairement un bus. Cela aurait très bien pu être un poids lourd, mais les modèles homologués avec plus de deux places sont rares. Finalement, nous sommes tombés sur cet autobus, vendu par une connaissance de la famille de Valentin, et ça a été le coup de cœur !

La phase d’aménagement a ensuite durée environ six mois. Cela a été énormément de boulot, de stress et de réflexion pour penser à tout faire dans le bon ordre. Nous avons tout fait nous-même en nous renseignant sur Internet, avec des tutos ou grâce à des chaînes YouTube comme Jujulebus, spécialisé dans l’aménagement de ce type de véhicule. Encore aujourd’hui, il nous arrive de l’appeler pour lui demander des conseils lorsque nous rencontrons des problèmes.

Avant de commencer l’aménagement, il nous a fallu deux mois de réflexion pour démêler ce grand casse-tête. Surtout que nous souhaitions aller dans le Grand Nord, donc l’isolation et le chauffage devaient être optimaux. Il faut aussi préciser que nous ne sommes pas passés d’une grande maison au bus directement. Il y a eu plusieurs étapes intermédiaires avec un plus petit appartement après la vente de notre maison. Le tri de nos affaires s’est donc fait au fur et à mesure.


Comment s’organise l’alimentation électrique de votre bus ?

On fonctionne uniquement à l’électrique, donc on a des gros besoins en stockage. Nous avons 6 panneaux solaires de 390 W et 6 batteries lithium. On a aussi un groupe électrogène en solution de secours, notamment pour le Grand Nord, où l’ensoleillement à cette période de l’année est plutôt modéré. Enfin, nous avons une solution de recharge qui fonctionne lorsque le bus roule.


Pourriez-vous nous donner une idée du budget de cet aménagement ?

Il est difficile de vous donner une somme précise, mais l’aménagement nous a coûté entre 35 000 et 40 000 €, dont 9 000 € pour l’achat du bus.

Roadcats FamilyRénovation de la chambre des parents, début 2021.

Avez-vous eu des complications pour obtenir l’homologation en VASP (Véhicules Automoteurs Spécialisés) pour votre véhicule aménagé ?

Ce n’est pas forcément simple à obtenir. Pour l’homologation, il y a deux dossiers RTI (Réception à Titre Isolé) à transmettre à la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement).

Un premier pour déclasser le bus en poids lourd et un second pour le passer en VASP : deux dossiers globalement similaires, avec cependant quelques spécificités. C’est une source de stress, car il est difficile de trouver toutes les informations nécessaires à l’homologation VASP. Les normes AFNOR sont un peu imbuvables et il y a une peur constante d’avoir oublié certains éléments. Le processus ensuite est plutôt long. Nous avons envoyé le dossier mi-avril, obtenu un rendez-vous fin mai et la validation finale mi-juillet. Mais par chance, c’est passé du premier coup !


Comment s’est organisée votre première année, entre période nomade et sédentaire ?

Le passage au bus s’est fait très facilement, nous nous sommes tout de suite sentis très bien à l’intérieur. On a commencé à habiter dedans avant la fin des travaux d’aménagement et sans homologation pour la route. Puis en juillet/août, nous avons fait notre premier roadtrip en Espagne, avant de nous poser quelques mois jusqu’en janvier pour que mon mari puisse travailler. Nous avons profité de cette période pour mettre de l’argent de côté, vendre certaines affaires et surtout terminer l’aménagement du bus. Nous sommes partis en février pour arriver au cap Nord, au nord de la Norvège, en avril. Nous avons préféré de ne pas partir au cœur de l’hiver, pour échapper aux grands froids. Globalement tout se passe très bien. Nous sommes satisfaits de notre aménagement. Nous avons eu quelques soucis de batteries liés à une erreur d’installation, mais cela fait partie du jeu…

Roadcats FamilyEn avril 2023 au cap Nord, en Norvège.

Est-ce compliqué de trouver des aires de stationnement adaptées, notamment dans les grandes villes ?

Étonnamment, ça ne l’est pas. Il y a toujours des emplacements pour les cars et les poids lourds. Évidemment, nous évitons de stationner en plein cœur des grandes villes. Nous prenons ensuite les transports en commun ou nos trottinettes électriques.

Il faut dire que nous ne sommes pas très « villes » … Nous visitons les capitales qui se trouvent sur notre route, mais sans nous y attarder, donc cela n’est pas un gros enjeu pour nous. Hors des grandes agglomérations, nous n’avons jamais eu de problèmes. Jusqu’ici, nous avons principalement traversé la Scandinavie, où les grands espaces sont très nombreux, donc aucun problème pour se stationner.


Contrairement à d’autres pays, comme les États-Unis, les bus aménagés restent encore peu nombreux en Europe. En avez-vous croisé beaucoup ?

Depuis le début de ce projet, j’échange avec beaucoup de personnes qui possèdent des bus aménagés mais effectivement, cela reste rare, y compris ailleurs en Europe. Depuis le début de notre périple en Scandinavie, nous n’en avons croisé qu’un seul. Des Finlandais, avec un sauna à l’arrière du bus !

Roadcats FamilyRoadcats Family24 mars - Jokkmokk, Suède.

Comment s’est passé votre séjour en Scandinavie ?

Nous avions comme idée de parcourir toute la Scandinavie, avec deux objectifs principaux : aller jusqu’au cap Nord et voir des aurores boréales. Nous avons commencé par le Danemark en février, avant de rapidement monter vers la Laponie. Nous avions envie de découvrir ces endroits complétement enneigés et le temps pressait, car les aurores boréales ne sont visibles que jusqu’à la fin mars. Nous gardons un superbe souvenir de la Laponie. Nous avons fait des randonnées en montagne, du chien de traineau, du patin à glace sur des lacs gelés, des repas autour d’un feu de camp… Et surtout, nous avons eu la chance de contempler plusieurs aurores boréales ! Je vois encore l’une d’elles, en particulier, au bord d’un lac gelé : une soirée mémorable… Je retiens aussi les Îles Lofoten, situées au nord du cercle polaire, en Norvège. Les spots pour les camping-cars sont presque uniquement en bord de routes, mais toujours avec des points de vue extraordinaires.

Et le cap Nord évidemment. La route est très sympa, on ne voit parfois rien sur des kilomètres… La sensation de bout du monde est vraiment particulière. La météo pouvait changer plusieurs fois par jour, mais globalement nous avons roulé sur des routes complétement enneigées.


Comment le bus et votre matériel ont-ils réagi au froid ?

Nous avons eu un tuyau d’eau chaude qui a gelé, mais rien de grave. Il nous a suffi de réorienter notre bouche de chauffage vers ce tuyau pour régler le problème. Nous avons aussi eu quelques petites fuites au niveau du moteur. Il a par exemple fallu changer une durite qui n’a pas supporté le chaud/froid. Mais ce sont des bricoles, quand on pense aux changements de températures que nous avons traversés. On s’estime plutôt chanceux sur ce point, et on se dit que l’aménagement du bus avait été plutôt bien pensé.


L’isolation du bus était-elle suffisante ?

Nous avons beaucoup de vitres, à l’avant notamment, qui apportent nécessairement du froid l’hiver et du chaud l’été mais cela reste un petit espace, donc nous n’avons pas de mal à le chauffer quand c’est nécessaire. Nous avons fabriqué des petits pare-soleils isolants que nous laisserons sur les vitres les nuits d’hiver et là où le soleil tape, pendant l’été.

Alors qu’il faisait -30° C à l’extérieur, nous ne sommes jamais descendus en dessous des 0° C à l’intérieur du bus. Et quand il faisait trop froid, nous chauffions la nuit.


Quelle va être la suite de votre périple ?

Nous partons en Estonie, avant de mettre le cap vers la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la République Tchèque, l’Autriche et la Suisse autour du mois de septembre. Ensuite, nous resterons en France jusqu’à décembre pour profiter de nos proches durant les fêtes, avant de descendre jusqu’au Portugal.

A l’été 2024, nous serons certainement de retour en France pour les festivals, avant de rouler vers l’Europe du Sud : Grèce, Albanie et Monténégro notamment, en 2024 et 2025.


Quels conseils donneriez-vous à des personnes souhaitant se lancer dans ce type d’aventure ?

Je dirais d’abord de bien se renseigner auprès de la DREAL, au niveau des normes à respecter. Même si cela ne devrait pas être le cas, les règles changent parfois d’une DREAL à une autre.

Aussi, nous constatons que l’accès aux VASP est de plus en plus compliqué pour les particuliers, donc cela peut être une bonne idée de passer par un professionnel pour le dossier d’homologation. Et enfin se faire confiance, s’écouter, et même si tout n’est pas parfait, se dire que ce n’est pas grave.

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Roadcats FamilyRoadcats Family7 février - Entrée au Danemark - 6 avril -Iles Lofoten, Norvège

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Visuels : © Roadcats Family