Junior Cars, un jeu d’enfants

Publié le 20/11/2023

Si vous êtes un habitué du Mans Classic, vous avez certainement remarqué ces petites voitures de sport conduites par des enfants lors de la parade « Little Big Mans »1. Ces répliques miniatures de modèles mythiques font le bonheur des enfants… mais aussi des amateurs d’anciennes. À la tête de Junior Cars Europe, Rudy Servol commercialise en Europe ces voitures produites en petites séries et très prisées des collectionneurs. Ce passionné est également un pilote de course automobile de haut niveau.

F1 GulfF1 Gulf

Passionné de sports mécaniques, vous évoluez en championnat de France GT au côté de Nicolas Prost. Pouvez-vous nous décrire votre parcours de pilote moto, puis auto ?

J’ai commencé par un cursus en vitesse moto, jusqu’à arriver aux portes de l’équipe de France. J’ai évolué dans plusieurs catégories jusqu’au championnat d’Europe Superstock. Mais lorsque j’ai dû arbitrer entre ma carrière sportive et mon activité professionnelle, j’ai choisi de privilégier cette dernière. Je dirigeais alors une enseigne de location puis de vente de camping-car, vans et fourgons aménagés. Il y a quelques années, on m’a proposé une course automobile lors d’une Rencontre Peugeot Sport 206, sur laquelle j’ai eu de bons résultats.

L’année suivante, j’ai rejoint une équipe avec laquelle nous avons gagné trois courses dans l’année. J’ai ensuite fait trois saisons en championnat de France Mitjet Series2 et quelques courses en Legends Cars Cup3. En 2014, je suis revenu en championnat de France Supertourisme. Puis après une pause, le Team Alpine / CMR est venu me chercher en 2019 pour épauler leurs pilotes professionnels en championnat de France GT. C’est ainsi ma troisième saison au côté de Nicolas Prost (fils d’Alain Prost, NDLR). Nous avons eu de très bons résultats et venons de signer avec Porsche.


Quand avez-vous décidé de vous lancer dans l’importation de voitures pour enfants ?

Il y a quelques années, je cherchais une réplique à l’échelle d’un modèle mythique pour mon fils de 5 ans. Je me suis aperçu qu’on ne trouvait en France que des véhicules très onéreux, ou avec une finition décevante. J’ai d’abord envisagé de me lancer dans la fabrication de telles voitures, mais j’ai vite compris que le projet n’était pas viable économiquement, avec une production en France. Puis un jour, mon équipier Nicolas Prost m’a montré la photo d’une réplique d’une célèbre Formule 1 pilotée par Jim Clark, qu’il avait achetée pour son fils.

Après lui avoir racheté la voiture, je me suis intéressé au constructeur, le groupe Harrington. J’ai constaté que leurs modèles n’étaient que très peu distribués en Europe et j’ai décidé de me lancer dans leur distribution il y a 2 ans. Avec mon associé Roger Nunez, un ancien de chez Michelin Compétition (Formule 1, MotoGP…), nous sommes devenus importateurs exclusifs pour l’Europe. Nous avons commercialisé les premiers modèles il y a un an et nous vendons une quinzaine de voitures par an.


Pouvez-vous nous décrire les gammes de voitures que vous proposez ?

Il s’agit de répliques à l’échelle 1:2 de modèles mythiques, italiens, britanniques... Les petites berlines que nous commercialisons, en modèles 2 places, sont des répliques de bolides ayant couru les 24 Heures du Mans. À ce titre, elles sont éligibles pour la course « Little Big Mans », un évènement extraordinaire auquel nous avons participé cette année. Chaque modèle de berline a ses spécificités : certaines ont le volant réglable en profondeur, d’autres ont des sièges coulissants…

Pour les monoplaces, il s’agit de répliques de voitures qui ont été championnes du monde de Formule 1, grâce à d’illustres pilotes comme Jacky Ickx ou Jim Clark. Le fabricant a mis un point d’honneur à se rapprocher au mieux des voitures d’origine. Les monoplaces sont toutes fabriquées sur la même base, seule la décoration change d’un modèle à l’autre. Deux modèles sont dotés d’un aileron arrière et nous proposons également la décoration Gulf, avec une décoration bleue et une bande orange, très demandée, même si celle-ci n’a bien sûr jamais existé en Formule 1.

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Ces voitures ont tout d’une grande… Quelles sont leurs caractéristiques techniques ?

Ces modèles sont dotés d’équipements dignes des vraies voitures de course de l’époque : des suspensions réglables, un réglage de chasse et de l’angle de carrossage, un volant extractible, un pédalier réglable en profondeur, des freins à disques… Les intérieurs sont en cuir, certains volants en bakélite…

Nous bridons les modèles que nous commercialisons en Europe à 20 km/h, par mesure de sécurité. Elles peuvent être conduites par des enfants à partir de 8 ans, ou par des adultes. Nous importons uniquement des modèles à motorisation thermique pour le moment (moteur 4 temps), avec un embrayage automatique et 3 vitesses.

Nous avons privilégié ce type de motorisation pour plusieurs raisons : importer des modèles électriques en Europe supposerait d’obtenir diverses homologations. Et l’avantage des moteurs thermiques est de pouvoir démarrer très facilement, même lorsqu’ils n’ont pas été utilisés pendant longtemps. À la différence des batteries électriques qui peuvent se dégrader et, pour les batteries au lithium, présenter certains risques potentiels…


Comment sont fabriquées les voitures ?

Les voitures sont fabriquées au Vietnam, à la main. Ce sont des voitures en métal, comme les modèles authentiques. Toutes les pièces sont fabriquées sur-mesure, avec un niveau de finition impressionnant, afin qu’elles ressemblent autant que possible aux modèles mythiques qu’elles évoquent. James MacLachlan, un ancien pilote britannique aujourd’hui à la tête de la division Junior Cars du groupe Harrington, y attache la plus grande attention. Harrington était au départ spécialisé dans les parechocs de voitures de collection. Ils ont un atelier polyester, un autre pour la mécanique, un pour la carrosserie… L’usine ne produit pas plus de 8 à 10 voitures par mois, c’est pourquoi il faut souvent attendre plus d’un an avant d’être livré.


Quel est le prix de vente de ces véhicules ? Comment expliquez-vous qu’ils soient aussi recherchés ?

Les monoplaces sont vendues en moyenne autour de 14 900 € HT et les berlines autour de 17 500 € HT. Comme les capacités de production des ateliers n’augmenteront pas, ce sont des modèles rares et dont la cote restera élevée en cas de revente. En achetant ces véhicules, nos clients réalisent aussi un investissement. Un exemplaire inspiré d’un modèle très recherché d’une ancienne Britannique, a ainsi été vendu récemment par RM Sotheby’s près de deux fois son prix d’acquisition.

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Des personnalisations sont-elles possibles ?

Oui, mais cela rallonge le délai de livraison… Le client peut en effet choisir la couleur des sièges intérieurs et la couleur extérieure de la carrosserie.


Commercialisez-vous des séries limitées ?

Harrington a sorti une réplique d’une voiture britannique rendue célèbre par James Bond, en série limitée, à 33 exemplaires. Nous avons réussi à en avoir 3 ou 4 pour l’Europe.


Existe-t-il une possibilité de changer une pièce ou des pneus, si besoin ?

Oui. Les voitures sont garanties un an et toutes les pièces sont disponibles en stock en cas de besoin, à un coût raisonnable.


Les voitures sont-elles soumises à des normes en Europe ?

Non, nous n’y sommes pas soumis, tout comme les véhicules de karting, par exemple. Cependant, nous avons déposé un dossier d’agrément afin d’obtenir la norme CE pour nos véhicules.

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Quel est le profil de vos clients ?

Il faut reconnaître que ces voitures sont avant tout des jouets pour les adultes… En réalité, les enfants ne sont finalement bien souvent qu’un prétexte pour les acheteurs ! La plupart sont des collectionneurs d’anciennes et il n’est pas rare qu’ils achètent à la fois une berline et une monoplace. Certains d’entre eux possèdent un exemplaire de la voiture d’origine, notamment pour les berlines, et achètent en plus un modèle à l’échelle pour les disposer toutes les deux côte à côte dans leur collection !

Nous comptons également parmi nos clients des pilotes de sports automobiles. Nous avons aussi été contactés par des collections privées et des musées. Les acheteurs français représentent 20 à 30 % de nos clients en Europe. Nous avons beaucoup d’acheteurs dans le nord de l’Europe (Belgique, Luxembourg…), en Allemagne et un peu en Angleterre.


Certains clients utilisent finalement très peu les voitures qu’ils ont achetées ?

En effet. Les monoplaces sont la plupart du temps stockées et roulent peu. Certains acheteurs préfèrent accrocher les voitures au mur, comme des œuvres d’art, d’autres les exposent dans le hall de leur société. Ceci explique pourquoi nous n’avons pour le moment jamais eu de réparations à effectuer en après-vente.


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Sur quels évènements peut-on voir vos voitures ?

Nos voitures ont roulé lors d’évènements comme le Chantilly Arts & Elegance Richard Mille, le Pau Classic Grand Prix ou Le Mans Classic.


Peut-on essayer les voitures, avant de s’en porter acquéreur ?

Nous avons quelques modèles en stock, essentiellement pour nos besoins en communication/marketing. Mais aucun acheteur n’a pour le moment demandé d’essayer les modèles à l’achat. La plupart se décident en quelques secondes, sur un coup de cœur, et se penchent assez peu sur les détails techniques de l’engin qu’ils achètent...


Envisagez-vous d’élargir votre catalogue ?

Harrington travaille sur le développement d’un nouveau modèle, mais il faut savoir que la création d’une nouvelle référence demande un investissement minimum de 35 000 à 40 000 €. Cela explique pourquoi le groupe en propose aussi peu.

Les premières Junior Cars

De La Chapelle

Les Automobiles De La Chapelle construisent leurs premières junior cars en 1979, des reproductions pour les enfants, à l’échelle 6:10, de modèles des marques mythiques Bugatti, BMW ou Ferrari. Les voitures, uniques et numérotées, sont entièrement réalisées à la main, de manière artisanale. La cote de ces véhicules ne cesse de grimper aux enchères. Si en 2018, une De La Chapelle Junior châssis n°125 était vendue plus de 33 000 € par Bonhams, l’exemplaire châssis n°28 de la même série atteignait en 2021 les 120 000 €, sous le marteau de RM Sotheby’s…

 

La Bugatti Baby

L’industriel et inventeur Ettore Bugatti crée en 1925 pour son fils la Bugatti Baby, une véritable Bugatti pour enfant à échelle 1:2. Présentée pour la première fois au salon de Milan en 1927, le modèle sera par la suite proposé aux enfants des clients de la marque, souvent des têtes couronnées et des célébrités. Dotée d’un moteur électrique alimenté par une batterie 12 volts et relié à l’essieu arrière par une couronne dentée, la «Baby» pouvait atteindre une vitesse d’un peu plus de 15 km/h. Elle sera produite en petite série, à seulement 500 exemplaires environ. Très prisés, ces modèles font aujourd’hui l’objet d’un véritable engouement de la part des collectionneurs qui se les arrachent souvent à plus de 100 000 € aux enchères...

1 Little Big Mans : Parade lors du Mans Classic, ouverte aux enfants de 7 à 12 ans au volant de voitures à moteur thermique ou électrique, répliques miniatures des modèles qui ont fait les belles heures des 24 Heures du Mans. Aucun classement n’est établi à l’issue de la course.

2 Mitjet Series : l’objectif est de permettre à un large public de participer des courses automobiles à moindre coût.

3 Legends Cars Cup : compétitions auxquelles participent des hot rods aux looks des années 1930/40.

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Visuels : © Junior Cars Europe

Sources et infos : Junior Cars Europe