MotoGP 2023 : Bagnaia-Quartararo, lutte à contre-courant

Publié le 25/05/2023 Par David Dumain

Cette saison 2023 voit le retour d’une rivalité entre les deux derniers champions MotoGP en date, deux pilotes que tout oppose ou presque : l’étoile filante Fabio Quartararo et le besogneux Francesco Bagnaia qui monte en puissance lentement, mais sûrement. Deux adversaires qui se connaissent depuis leurs débuts et dont les méthodes – et les motos – sont radicalement différentes.

Un début de MotoGP 2023 compliqué pour Fabio Quartararo

La saison 2023 a démarré depuis mars, et plusieurs compétiteurs ont déjà dû tirer leur révérence. Si ce n’est pas le cas du célèbre pilote Quartararo, celui-ci n’est néanmoins pas en très bonne posture face à son concurrent Bagnaia.

Un début de saison qui rebat les cartes

Plus longue que jamais avec 21 rendez-vous, la saison 2023 de MotoGP promet d’être aussi une véritable épreuve d’endurance, avec pas moins de 42 courses. Après le premier rendez-vous portugais, quatre pilotes de premier plan ont été contraints de renoncer à leur voyage en Argentine pour la seconde épreuve : Pol Espargaro, sévèrement touché aux vertèbres, Enea Bastianini, omoplate cassée, Marc Marquez en raison d’une main abîmée dans son accrochage avec Miguel Oliveira, lui aussi blessé et forfait pour le Grand Prix d’Argentine.

Au championnat aussi, l’épreuve inaugurale a « fait du vide », Quartararo, dixième, pointant déjà à 29 points du leader Bagnaia. Entre la Ducati de l’italien et la Yamaha du français, nombreux sont les prétendants aux victoires et à la couronne. Toutes les motos du plateau sont en effet aujourd’hui capables d’emmener leurs pilotes au sommet.

Fabio Quartararo en perte de vitesse ?

Nouvelle saison, nouvelle donne... Fabio Quartararo est d’ordinaire un pilote qui frappe fort d’entrée de jeu, qui se fait remarquer d’emblée. Ce fut le cas lorsqu’il débarqua en Grands Prix, avec un podium avant même ses 16 ans. Ce fut encore le cas à son arrivée en MotoGP avec le record de précocité pour sa première pole en catégorie reine. Il arrive hélas qu’après ses coups d’éclat, le prodige s’essouffle en fin de saison. Un profil inverse par rapport à son rival annoncé, le champion du monde en titre, le discret « Pecco » Bagnaia, qui a pris son temps pour émerger. L’italien a en effet pour habitude de monter en puissance. L’an passé, il a notamment repris la bagatelle de 91 points sur Quartararo sur la seconde partie du championnat pour aller chercher son premier sacre suprême, son second en Grands Prix.

La première course de la saison 2023 nous a cependant réservé un scenario inédit, avec un Bagnaia outrageusement dominateur à tous les niveaux, quand Quartararo s’est débattu avec sa Yamaha autant qu’avec ses adversaires... et le nouveau règlement.

Des nouvelles courses sprint sur le MotoGP 2023 qui ne plaisent pas à Quartararo

Les nouvelles courses sprint qui se dérouleront désormais chaque samedi ne plaisent pas à tout le monde, et notamment pas à deux coureurs en particulier : Enea Bastianini et Fabio Quartararo. Enea Bastianini est la révélation de l’an passé et la victime principale de la fièvre qui s’est emparée de nombreux pilotes chauffés à blanc par ce « sprint » de 12 tours, soit la moitié de la course du lendemain.

« Oui, c’est dangereux » lâche Fabio Quartararo, qui préfère souvent voir d’autres pilotes monter en première ligne pour ce qui relève de la contestation. Il ne mâche pas ses mots : « Il va y avoir un gros accident. Bientôt. C'est une jungle. On n'est pas en automobile, où quand on se touche, ça ne pose pas de problème et c'est beaucoup plus sûr. » D’où l’importance de posséder une bonne assurance moto pour les coureurs, qui ne sont, eux, malheureusement pas à l’abri d’un accident grave.

Le français, même s’il ne tient pas à devenir la figure de proue de la contestation, est clairement opposé à ce nouveau format sur le MotoGP 2023. Celui-ci génère en effet un surplus d’agressivité entre pilotes, lui-même étant entré en contact avec Joan Mir et Alex Marquez lors de cette course sprint. « Je pense que pour la sécurité, il est préférable de faire deux fois 25 tours plutôt qu'une fois 12 tours » renchérit Fabio, qui a clairement déclaré que les contraintes physiques engendrées par une course supplémentaire n’étaient pas un problème pour lui.

C’est pourtant sur ce point que son rival Bagnaia, vainqueur du sprint inaugural (et des douze points promis au gagnant) faisant figure d’apéritif avant la « vraie » course du lendemain, a exprimé des réserves. « J’étais très fatigué samedi parce que c’était une longue journée. Quand on se qualifie en première ligne, on a des obligations médiatiques alors que l’on doit se préparer pour le sprint, mais aussi manger... Sur certains circuits, il faudra réfléchir à réduire le Grand Prix, parce que Portimão n’est pas aussi exigeant que des circuits comme le Mugello ou Austin. »

Bagnaia Ducati

MotoGP 2023 : un résultat très incertain dû à un matériel plus homogène

De l’avis de tous, jamais le MotoGP n’aura été aussi disputé. Depuis que les quatre-temps de 1 000 cm3 ont remplacé les explosifs moteurs deux-temps vingt ans auparavant, le prestigieux championnat du monde de vitesse a longtemps subi la domination d’une poignée de pilotes. D’abord Valentino Rossi durant toute la décennie 2000, tout juste contesté par l’Australien Casey Stoner et l’Américain Nicky Hayden. Puis est arrivée la génération de prodiges espagnols, Jorge Lorenzo puis Marc Marquez, qui se sont partagés les titres mondiaux de 2010 à 2019. Les blessures de ces derniers les ont écartés, laissant place à une nouvelle génération qui se partage désormais les lauriers.

La grille de départ compte aujourd’hui autant de vainqueurs potentiels à chaque départ de course, la saison 2021 ayant vu un record de 9 vainqueurs différents alors qu’ils étaient encore 7 à monter sur la plus haute marche en 2022, dont deux nouveaux (Enea Bastianini et Aleix Espargaró).

Un phénomène qui ne s’explique pas tant par le niveau de pilotage que par un matériel plus homogène, toutes les marques aujourd’hui alignées prétendant à la victoire (cinq des six constructeurs présents sur la grille ont triomphé en 2022, à la notable exception de Honda). Preuve de ce formidable contexte compétitif favorable au spectacle, les quatre derniers championnats ont été remportés par quatre pilotes différents sur quatre marques distinctes.

Bagnaia Quartararo MotoGP

Bagnaia et Quartararo, les deux grands favoris ?

Pourtant, dans ce formidable contexte favorable au spectacle émergent deux talents notables : Fabio Quartararo et Francesco Bagnaia. Les deux pilotes se sont échangé les premières et deuxièmes places des deux dernières campagnes. Ils figurent logiquement aujourd’hui comme les figures de proue de leur marque, Yamaha et Ducati, et les logiques favoris d’un championnat MotoGP 2023 qui soulève de nombreuses questions.

L’apparition des courses sprint, le samedi, va profondément rebattre les cartes et changer le rythme auquel sont habitués les pilotes de la catégorie reine, avec une immanquable dimension physique supplémentaire. Une inquiétude pour le clan du français Quartararo.

Pour les deux derniers champions, la situation « interne » est diamétralement opposée au sein de la marque qui les emploie. Si Fabio Quartararo est plus seul que jamais chez Yamaha, avec seulement deux M1 sur la grille de départ et un coéquipier, Franco Morbidelli, étrangement fantomatique, Pecco Bagnaia doit quant à lui composer avec une armée de pilotes Ducati, dont la saison passée a montré qu’ils lui étaient plus ou moins fidèles. Peu de soutiens dans un cas, des alliés menaçants dans l’autre, les situations du français et de l’italien sont différentes mais toutes deux compliquées.

Au niveau du matériel, la saison 2022 a révélé une outrageante domination des Ducati sur le reste du plateau. Yamaha en particulier, en ce qui concerne notamment la puissance du moteur, pour le moins essentielle dans tous sports mécaniques. Les ingénieurs italiens ont certes été bridés par le règlement pour leurs aménagements sur la partie-cycle, mais ils ont tout de même trouvé quelques chevaux supplémentaires à leur moteur durant l’hiver.

Quartararo Yamaha

Un changement de matériel bénéfique pour Quartararo ?

Le pilote français dispose cette année d’un nouveau moteur pour son bolide, essentiel pour tenir la distance sur ce MotoGP 2023. Cela ne lui assure néanmoins pas la victoire face à son concurrent Francesco Bagnaia.

Un moteur plus puissant pour le pilote français

Pour Quartararo, qui a renouvelé son contrat chez Yamaha à la condition que son matériel évolue, l’apport d’un moteur plus puissant était crucial. Il a en effet dû composer avec une machine inférieure à celles de ses adversaires sur ce point depuis son arrivée en MotoGP en 2019. Le français parvenait cependant à « casser la baraque » dès son arrivée dans la catégorie reine avec une M1 volontairement bridée en régime-moteur à ses débuts (Fabio n’étant que le pilote numéro 2 chez Petronas, Morbidelli l’ayant précédé en MotoGP, nanti d’un titre de champion Moto2).

Mais Quartararo a montré son agacement sur ce point ces dernières années, en particulier l’an passé après une tentative avortée de lui apporter des « chevaux » durant la période hivernale autorisée. « El Diablo » a pu assurer de gros points lors de la première partie de la saison de moto sur circuit, avant que Bagnaia ne prenne la mesure de sa surpuissante machine et n’effectue sa spectaculaire remontée. Un nouveau moteur Yamaha était donc promis dès les tests de Valence, suivant l’ultime Grand Prix 2022.

Les tests hivernaux ont donc été cruciaux pour constater les progrès des forces en présence, notamment les derniers en mars à Portimão. Fabio Quartararo y a terminé avec le troisième chrono derrière Bagnaia, cette fois bien déterminé à ne pas rater son entame de saison, et son compatriote Johann Zarco sur Ducati. Un excellent chrono et une Yamaha dont le quatre-cylindre en ligne (contrairement à l’architecture « en V » du moteur sur la Ducati) délivre enfin une puissance propre à afficher des vitesses de pointe comparables à celles de la concurrence sur ce MotoGP 2023.

La prudence reste de mise pour ce MotoGP 2023

Fabio restait cependant prudent, malgré son excellent chrono : « Au cours des trois ou quatre dernières années, nous avons eu pratiquement la même moto, mais cette année, nous avons changé beaucoup de choses, même trop. Les autres travaillent et évoluent pas à pas, mais pour nous, cela a été trois ans avec la même moto et tout à coup, c’est complètement différent. Pour moi, nous nous sommes égarés, mais nous avons recommencé à utiliser ce que nous avions par le passé, mais avec de petites modifications. Je m’attends à d’autres problèmes en début de saison, mais si Yamaha continue à travailler et à apporter quelque chose de nouveau, je suis certain que nous pourrons nous battre dans la seconde moitié de saison ».

Même rhétorique et même prudence dans le bilan dressé par le manager de Quartararo, Eric Mahe, qui avait conditionné les évolutions techniques à la reconduction du contrat de son poulain « en bleu » : « On est revenu à la situation normale. On n’a toujours pas la meilleure moto du plateau, mais on va être capable de se battre. On n’est jamais sûr de gagner une course, on n’est jamais sûr de la perdre, mais on sait si on a les moyens de se battre ou pas : là, on a les moyens de se battre ! »

Reste que le meilleur chrono à l’issue des deux journées du MotoGP 2023 demeure celui du plus fort adversaire de Fabio, ce qu’il n’élude pas : « Si je n’avais pas vu le chrono de Bagnaia, je dirais que nous sommes revenus dans la course. Mais nous sommes définitivement en meilleure position qu’il y a un an ».

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Visuels : © David Reygondeau