La Route des Légendes :
renouer avec l’esprit du Dakar d’antan

Publié le 15/07/2024

La Route des Légendes s’élancera du 27 au 29 septembre sur le tracé historique des premiers départs du Paris-Dakar (RN20), entre Versailles et Sète. Nul doute que les spectateurs viendront nombreux pour admirer les véhicules emblématiques du célèbre rallye-raid. Dédié à la mémoire d’Hubert Auriol et de René Metge, ce rallye historique entend fédérer ceux qui y ont participé et ceux qui en ont rêvé. Rencontre avec les organisateurs, Philippe Vassard, pionnier du Dakar à moto, et Thierry Roger, créateur de l’Enduro Vintage du Touquet et ex-organisateur du Dakar.


Les organisateurs

Thierry Roger et Philippe Vassard

Thierry Roger (à gauche)

Il est le créateur de l’Enduro Vintage du Touquet, avec Bernard Baudoux. Il a participé à l’organisation du Paris-Dakar à partir de 1985, puis à celle de nombreux rallyes raid comme le Rallye de l’Atlas, la Transorientale ou l’Africa Eco Race.

Philippe Vassard (à droite)

Ancien pilote moto professionnel en vitesse, endurance, rallyes routiers, rallyes raid et enduro. Il a participé aux deux Rallyes Abidjan-Nice puis à dix Paris-Dakar, dont le 1er au guidon d’une 250 cm3. Il finit 3e au classement général devant la 1ère auto. Depuis de nombreuses années, il est engagé dans la prévention des risques routiers en entreprise et la sécurité routière, et a notamment assuré la promotion des Airbags Moto.


Comment est née l’idée de ce rallye ?

Philippe Vassard (P.V.) : Après le décès d’Hubert Auriol en 2021, avec un cercle d’amis proches, nous avons pris l’engagement auprès de sa famille d’organiser un rallye à son nom pour lui rendre hommage. Et pour cause, Hubert Auriol est une légende dans le milieu de l’automobile, et bien au-delà. Hubert est le premier pilote à avoir gagné le Paris-Dakar dans les deux catégories (moto et auto). Nous avons décidé de l’organiser en France afin de rappeler l’écho extraordinaire qu’avait le Paris-Dakar dans l’Hexagone. Un rayonnement qu’on a peut-être un peu oublié aujourd’hui, à l’heure où la course s’est éloignée (voir encadré en fin d’article).

Une première tentative de recréer ce parcours a eu lieu en 2022. Des anciens du Dakar et autres fans étaient ravis de participer et nous avons constaté une forte adhésion du public. Un engouement confirmé par le gros succès de l’exposition inédite sur le Dakar organisée à Rétromobile 2024. Beaucoup de jeunes s’intéressent aux grandes heures du Dakar et souhaitent en savoir plus : pourquoi il touchait autant de monde, etc.


Vous rendrez également hommage à René Metge, disparu il y a peu ?

Thierry Roger (T.R.) : En effet, nous avons aussi le souci de renouer avec un passé sportif et de marcher sur les traces de grandes vedettes comme Cyril Neveu, Hubert Auriol, Jacky Ickx, Claude Brasseur, Patrick Zaniroli et bien sûr René Metge, dont nous tenons à saluer la mémoire. Il fut l’un de nos plus grands pilotes automobiles de rallye-raid, avant de devenir organisateur d’épreuves comme le Paris-Moscou-Pékin et le Paris-Dakar, qu’il a remporté à trois reprises en catégorie auto.

Porsche AlmerasRéplique de la « Porsche du désert » conduite par Jacky Ickx et Claude Brasseur sur les Dakar 1981 et 1984.


Quel est l’esprit de La Route des Légendes ?

P.V. : Le but est de retrouver l’esprit du Dakar d’antan et avant tout, de se faire plaisir. Pour éviter les accidents, comme cela arrivait parfois lors des premiers Dakar sur la partie française. Il n’y aura pas de chronomètre et les trajets seront accessibles à tous. Les participants seront aussi bien des anciens du Paris-Dakar, que des jeunes passionnés ou des journalistes de la presse. Par ailleurs, nous voulons à travers cet évènement rappeler que les liens avec l’Afrique de l’Ouest restent très forts, même s’il est aujourd’hui un peu plus difficile de s’y rendre. Le but est de donner envie à certains participants, plus jeunes, d’aller y rouler, là où c’est encore possible, comme au Maroc ou au Sénégal, par exemple.


Pouvez-vous nous parler de l’organisation de l’évènement ?

T.R. : Le rallye se déroule exclusivement en France sur la RN20. Nous avons un statut associatif. Une vingtaine de bénévoles travaillent avec nous sur l’évènement, pour la plupart des jeunes passionnés par l’histoire du Paris-Dakar, que nous avons rencontrés à Rétromobile. Pour relayer l’évènement, nous nous appuierons sur la presse quotidienne régionale, la presse spécialisée auto et moto et nous mettons en place un partenariat radio. Nous avons aussi un partenariat avec le site Dakar D’antan, consacré à l’histoire des 8 premiers Dakar, qui compte plus de 25 000 abonnés. Plusieurs marques sont aussi partenaires de l’opération, dont Yamaha, Honda et Motul.


Vous avez aussi prévu des parcours tout-terrain ?

T.R. : En effet, cela nous a semblé important, pour remplacer les spéciales de l’époque. Nous avons donc ajouté deux épreuves tout-terrain facultatives, une près d’Orléans et une autre sur le circuit tout-terrain de Compreignac en Haute-Vienne (87), chez Christophe Meillat(1), un ancien pilote moto du Dakar.

Philippe Vassard devant une Honda Africa Twin.Philippe Vassard devant une Honda Africa Twin.


Combien espérez-vous de participants pour cette première édition ?

P.V. : Nous avons déjà environ 40 inscrits à moto et 20 en automobile 4x4 et nous tablons sur une centaine de véhicules maximum afin que cela reste convivial. Nous sommes confiants sur l’engouement que ce rallye devrait susciter. Le vintage est à la mode, il n’y a qu’à voir le succès de l’Enduro Vintage du Touquet, qui attire chaque année plus de 700 participants.


Quels sont les véhicules les plus remarquables qui seront présents ?

P.V. : Nous espérons avoir des véhicules mythiques comme la Jeep Wagoneer du Dakar 1979 ; la 4L des Dakar 1979-80 et la R20 des frères Marreau (Dakar 1981-82) ; le Range Rover VSD n°212 qui était piloté en 1981 par René Metge ; la Citroën CX et la Porsche 911 type 953 de Jacky Ickx et Claude Brasseur (engagée en 1981 et 1984) ; ou le Toyota n°189 du Dakar 1981. La Citroën Traction Avant de Marc Joineau, qui était pilotée par Diane Thierry-Mieg, ex-épouse de Thierry Sabine(2) en 1982, devrait être là aussi. Coté deux-roues, le Club Ténéré sera présent avec vingt motos, ma DKV 750 Quattro (une Kawasaki 4 cylindres engagée sur le Dakar 1985), la 400 KZ Kawasaki de Fenouil et des Honda Africa Twin d’époque.

T.R. : Précisons que la plupart sont des véhicules répliques, car les rares originaux conservés sont exposés dans des musées, ou aux mains de spéculateurs qui ne les sortent pas. Beaucoup de nostalgiques ont conservé des véhicules mais la plupart des voitures, qui étaient souvent entreposées dans des granges, ont mal vieilli.


Les municipalités des villes étapes ont-elles accueilli favorablement le passage de votre rallye ?

T.R. : Oui, les mairies sont ravies de l’effervescence et de l’animation que va générer notre évènement. La ville de Versailles nous autorise à disposer de la grande place située devant le château et les maires de Brive-la-Gaillarde et Montauban nous accueillent en centre-ville. À Sète, nous avons déjà un préaccord favorable. À Orléans, Limoges et Toulouse, nous serons accueillis sur des terrains privés.

Traction AvantLa Traction Avant de Marc Joineau, un modèle des années 1950.


Quels sont les anciens concurrents du Dakar qui participeront ou seront invités ?

P.V. : Cyril Neveu (cinq fois vainqueur du Paris-Dakar entre 1979 et 1987) devrait être présent au départ à Versailles, ainsi que Jean-Pierre Fontenay (pilote automobile vainqueur du Rallye Dakar 1998) et Raymond Loizeaux (22 Dakar à son actif en moto) à Brive, et Serge Bacou (engagé sur le Dakar en moto entre 1981 et 1987) à Montauban. Le vendredi soir, un dîner réunira des anciens du Dakar à Versailles.


Philippe, vous avez participé au Paris-Dakar à moto de 1979 à 1988, quels sont vos souvenirs de l’étape française ?

P.V. : L’accueil était formidable. Dès la deuxième édition, nous partions le jour du Nouvel An, ce qui s’est avéré un excellent choix de date : 50 000 à 300 000 personnes se pressaient au départ sur la place du Trocadéro ! Puis nous partions du château de Versailles et 350 000 personnes nous attendaient à chaque fois ! C’est l’équivalent du public présent aujourd’hui à l’Enduropale du Touquet, mais qui y est réparti sur 15 kilomètres…

Ensuite nous empruntions la Nationale 20 où plusieurs centaines de milliers de personnes nous attendaient tout le long du parcours. Le trajet jusqu’à Sète s’effectuait alors sur une journée, avec une partie en nocturne. Nous roulions à partir de 7 heures du matin, sous la neige ou la pluie. À chaque contrôle de passage, il y avait du monde. Des spéciales avaient lieu sur des terrains militaires, à Orléans ou aux Garrigues (près de Nîmes). Avec le Rallye des Légendes, nous espérons retrouver un peu de l’ambiance de l’époque et revivre cette ferveur populaire, notamment lors de l’arrivée à Brive-La-Gaillarde et à Sète.


Concernant la moto, on constate aujourd’hui un grand retour du trail. Que signifie cette tendance, d’après vous ?

P.V. : Ce retour du trail montre qu’il y a une forte envie d’évasion dans la moto actuellement. Même si tout le monde ne peut pas se rendre en Afrique, on peut aussi s’évader sur les routes de France. La BMW GS 1200 est dérivée des victoires d’Hubert Auriol et de Gaston Rahier. L’Africa Twin de Honda a aussi toujours le vent en poupe, tout comme la Yamaha Ténéré qui continue d’évoluer après 40 ans d’existence. On peut aussi citer KTM qui a inscrit plus de 20 victoires au Dakar.

Range Rover VSDLe Range Rover VSD, réplique de celui piloté par René Metge sur le Dakar 1981.


Vous avez croisé de nombreuses personnalités lors du Dakar. Étaient-elles facilement accessibles ?

P.V. : En tant que pionnier du Dakar, j’ai bien sûr rencontré Thierry Sabine, Daniel Balavoine, mais aussi des personnalités comme Mark Thatcher (le fils de Margaret Thatcher qui participa en 1982), l’actrice Chantal Nobel, la présentatrice Évelyne Dhéliat, Gérard Lenormand ou Johnny Hallyday. Dans le désert, il n’y a pas de vedettes. De manière générale, toutes les personnalités deviennent beaucoup plus simples et très accessibles lorsqu’elles sont sur le terrain, en rallye.

T.R. : Hubert Auriol était très différent lorsqu’il planifiait l’organisation du rallye avec ASO (Amaury Sport Organisation) et lorsqu’il était sur le terrain, où il était toujours à l’écoute des petits problèmes que pouvaient rencontrer les concurrents. René Metge était pareil. À l’époque, la pression de l’argent était moins forte.

Mitsubishi PajeroLe Mitsubishi Pajero inscrit au Dakar de 1999, parti de Barcelone et inscrit en catégorie Marathon.

(1) Christophe Meillat compte 43 rallyes africains dont 10 Dakar au compteur, ainsi que 20 participations à l’Enduropale du Touquet.

(2) Thierry Sabine : pilote de rallye français, fondateur du Rallye Paris-Dakar et de l’Enduro du Touquet. Il décède dans un accident d’hélicoptère le 14 janvier 1986 au Mali, lors du Paris-Dakar.

Tout savoir sur la route des légendes

La Route des légendes est un rallye touristique moto, auto et camion, avec roadbook, ouvert aux véhicules produits jusqu’en 1997. Il reprend le parcours qu’empruntait le rallye à partir de 1981. Le trajet suit la RN20, à la découverte de villages pittoresques et de panoramas à couper le souffle, à travers forêts, routes sinueuses et vallonnées ou routes côtières. Une première tentative de recréer ce parcours en 2022, la Hubert Auriol Classic, rassembla une cinquantaine de véhicules.

Pour cette édition 2024, les participants utiliseront un roadbook pour suivre un itinéraire défini. Un équilibre entre découverte des paysages et concentration sur le parcours sera nécessaire pour maintenir une moyenne correcte pour arriver à temps à chaque point de contrôle sur ce trajet long de 970 km. Des CH (contrôles horaires) et des CP (contrôles de passages) seront situés à Versailles, Orléans, Châteauroux, Compreignac, Brive-la-Gaillarde, Montauban, Toulouse et Sète. Un prix de participation sera remis à tous les participants et un prix de l’esprit d’équipe récompensera le meilleur. Deux arrêts off road facultatifs auront lieu : le 1er dans un centre de pilotage à Sougy, près d’Orléans, et le 2ᵉ au circuit tout-terrain de Compreignac, près de Limoges. À noter que 20 € seront récoltés par participant puis redistribués à l’association Les Puits du Désert (qui creuse des puits au Sénégal et au Sahel) afin de créer un puit au nom d’Hubert Auriol.

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Visuels : © Philippe Donat, Pierre Kress / La Route des Légendes